lundi 6 avril 2020

Une fille de passage de Cécile Balavoine

Date de parution : mars 2020 chez Mercure de France
Nombre de pages : 240

" On se vouvoie, on se louvoie."

New-York, septembre 1997. Cécile, la narratrice, une jeune femme de 25 ans partie à New-York pour poursuivre ses études de lettres, fait la connaissance d'un de ses professeurs, le célèbre Serge Doubrovsky, inventeur, vers la fin des années 70, du concept de l'autofiction  pour désigner le fait d'écrire sur soi. Elle rentre dans l'intimité de son professeur-écrivain lorsqu’il lui propose de loger avec deux de ses amis étudiants dans son appartement new-yorkais pendant l'année qu'il va passer à Paris. Le bureau de Doubrovsky devient sa chambre avec vue sur les Twin Towers.

Pendant toute cette année un échange de lettres va la relier à cet homme pour qui elle éprouve des sentiments mélangés, ils entretiennent une relation très forte entre fascination, complicité et connivence intellectuelle. Mais cet homme a trois fois son âge, il a l'âge de son grand-père "45 ans nous écartèlent". Elle éprouve aussi compassion et curiosité envers cet homme dont la vie a été jalonnée de tragédies et de drames et qui pense lui-même beaucoup à sa propre mort, elle veut "éloigner de sa présence son malheur, apaiser de sa jeunesse sa vieillesse".

Lorsque Serge décide de raconter leur histoire dans son prochain roman qui sera très certainement le dernier, Cécile est à la fois fière et inquiète de devenir un personnage de son roman, elle va vivre l'expérience curieuse de lire ce que quelqu'un a écrit sur soi. Pendant une vingtaine d'années, Cécile et Serge vont se rencontrer régulièrement à Paris ou à New York, échanger sur leur vie, sur la littérature et Serge va continuer à pousser Cécile à écrire.

" Je comprenais maintenant que s'il n'avait été 
ni un amant, ni vraiment un ami, 
ni un grand-père ni tout à fait un confident, 
que s'il n'existait pas de mot pour qualifier ce lien 
qui nous avait unis et qui continuerait probablement de nous unir, 
Serge était devenu un repère de ma vie."

Cécile Balavoine lève ici le voile sur une relation privilégiée et secrète qu'elle a entretenue pendant de nombreuses années avec Serge Doubrovsky. Le titre qu’elle a choisi pour son roman fait écho à celui de Doubrovsky "Un homme de passage" dans lequel il évoquait une jeune fille avec qui il aurait aimé avoir une relation amoureuse mais qui s'était refusée à lui en lui faisant comprendre qu'il avait l'âge d'être son grand-père. La relation entre Cécile et Serge est faite d'amitié amoureuse, d'admiration-fascination de l'élève pour son maître écrivain et du rappel de l'image de son grand-père... 
J'ai commencé ce roman avec une certaine appréhension car je craignais de ne pas l'aimer autant que l'inoubliable Maestro, et c'est vrai qu'au début j'ai été un peu déçue de ne pas retrouver la sensualité qui émanait du premier roman de Cécile Balavoine, jusqu'à ce que je comprenne qu'elle était en train de nous raconter une autre forme d'amour d'une infinie beauté, l'histoire d'une douce intimité qui se tisse au fil du temps. J'ai lu ce roman d'une traite sans pouvoir le lâcher. Il est doux, délicat, élégant et extrêmement pudique...Un magnifique roman qui fait du bien...


Citations
" Écrire, inévitablement, c'était mourir et faire mourir un peu. Faire glisser des êtres bien réels dans le chas d'une histoire, leur faire passer la porte de nos obsessions, le seuil de nos fantasmes, le cagibi de nos angoisses, c'était les altérer, les estomper ou bien les amplifier, nécessairement les contorsionner. Les tuer ou les ressusciter."



L'auteure
Professeur de littérature, Cécile Balavoine est docteur en littérature française et titulaire d’une maîtrise d’allemand.
 Après l’Autriche, l’Allemagne puis New York, où elle a vécu et enseigné pendant dix ans à New York University et Columbia University, elle a retrouvé la France pour devenir journaliste, en 2007. Cécile enseigne à Columbia University in Paris, Smith College et Sciences Po Paris, mais elle écrit aussi pour divers magazines, notamment Air France Magazine, Voyages d’Affaires ou encore IDEAT, des sujets voyages et culture. En 2006, lors du 250e anniversaire de la naissance de Mozart, elle a publié un petit volume sur Salzbourg aux éditions du Mercure de France. À cette occasion, elle a pu rencontrer de nombreux musiciens, chanteurs et chefs d’orchestre, et renouer avec son ancienne passion pour la musique. Elle contribue depuis octobre 2007 aux pôles littérature et musique de nonfiction.fr. En 2017, elle publie son premier roman, "Maestro", ainsi qu’une anthologie, "Le goût du piano", aux éditions Mercure de France.


Lu de cette auteure 
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