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lundi 30 novembre 2015

Vernon Subutex 1 de Virginie Despentes



Date de parution : janvier 2015

C'est l'histoire de Vernon, 50 ans, disquaire dont la boutique a dû fermer, il se retrouve au chômage et est bientôt expulsé de son appartement. Il va alors chercher à se faire héberger chez des anciens amis, compagnons de sa folle jeunesse dans le monde du rock, monde où came et sexe dominent le quotidien. On va ainsi rencontrer une foule de personnages qui vont constituer un excellent reflet de notre société.
Au début, j'ai eu du mal à suivre tous ces protagonistes en essayant de retenir les liens qu'ils pouvaient avoir entre eux puis je me suis laissée porter par la lecture et là, je me suis régalée...
Virginie Despentes excelle dans le portait de ces paumés, je retiens en particulier La Hyène et son activité sur internet, Aïcha et son choix pour l'islam ainsi que sa confrontation au passé de sa mère, Patrice l'homme qui ne maitrise pas sa violence et maltraite sa femme, Sophie et sa lutte pour son fils qui mourra d'une overdose, Olga et ses conseils de SDF... sans oublier le très beau passage sur la mort de la chienne de Xavier et du chien d'Olga. Ces passages sublimes compensent largement ceux où Virginie Despentes nous inondent, un peu trop..., de scènes de drogue et de sexe.

Le vieillissement, la solitude contemporaine, la dématérialisation de l'amitié à l'époque de Facebook sont au centre de ce très beau roman servi par l'écriture rageuse de Virginie Despentes.

dimanche 29 novembre 2015

La condition pavillonnaire de Sophie Divry




Date de parution : août 2014

L'auteure nous décrit par le menu les mille et un détails qui remplissent une vie, en l'occurrence la vie de M. A.
On y voit son enfance marquée par l'ennui, son arrivée en ville dans sa chambre d'étudiante et la solitude qui l'assaille, ses amitiés et amours pendant sa période étudiante, la formation de son couple, la transformation des relations dans son couple à l'arrivée des enfants, l'achat du pavillon, les vacances, les invitations des amis le samedi soir, les accidents de parcours professionnels avec licenciement, le bouleversement généré par sa ménopause, les affres du vieillissement.
M. A. est toujours dans l'insatisfaction, tant sexuelle que générale, confrontée à la monotonie de sa vie et à la dépression, elle tente de trouver des issues dans l'acupuncture, la pratique du yoga, les séances chez le psy, l'engagement dans le bénévolat, mais elle abandonne tout très vite.

Ce livre plein de mélancolie se lit d'une traite, parfois on comprend l'héroïne, parfois on a envie de la secouer, de lui faire prendre conscience de tout ce qu'il y a de positif dans sa vie.
Bref, on ne reste jamais indifférent, c'est ce qui rend ce livre sur la condition féminine si agréable à lire.

samedi 28 novembre 2015

L'expérience de Christophe Bataille


Date de parution : janvier 2015 chez Grasset
Nombre de pages : 72

En 1960, à l'âge de 21 ans, le narrateur se retrouve aux arrêts pour rébellion pour avoir chuté lors du défilé du 14 juillet. Il est alors envoyé dans le Sahara pour une mission secrète comme cobaye pour évaluer le niveau de radiation supportable par le corps humain. C'est l'opération "Gerboise verte" qui aura lieu le 25 avril 1961.
Dans ce livre l'auteur dénonce le scandale des soldats cobayes exposés délibérément aux essais nucléaires menés par la France dans les années 1960 en Algérie pour étudier les effets physiologiques et psychologiques produits sur l'homme par l'arme atomique. Ce sont les sacrifiés du nucléaire français, les irradiés de Reggane délibérément sacrifiés à la raison d'État.
Ce texte bref est fort, poignant, marquant, on en ressort ébranlé et en se demandant comment tout cela a pu exister.
En prêtant sa voix à ces hommes, Christophe Bataille arrache à l'oubli ces victimes sans nom ni matricule immolées sur l'autel du progrès atomique. Merci à lui de m'avoir fait découvrir cette horreur.


Citations
"Depuis ce jour dans le désert, je ne sais qu'une chose. Peu importe la vie des hommes, puisque la mort ne se combat pas." 

"Les hommes cherchaient mon regard: c'est ça, être un chef: être sans regard; ou montrer des yeux si vides qu'ils en paraissent décidés."

vendredi 27 novembre 2015

Les douze tribus d'Hattie d'Ayana Mathis

Date de parution : janvier 2014 chez Gallmeister
Nombre de pages : 311


Les chapitres successifs de ce livre donnent l'impression de nouvelles indépendantes qui retracent l'histoire d'une famille afro-américaine de 1923 à 1980.
Hattie née en 1908 quitte la Géorgie pour Philadelphie à 15 ans avec sa mère et ses 2 sœurs. Elle se marie très vite avec August dont elle est enceinte, son mari se révèle être faible et volage. C'est elle qui doit tout assumer, la mort de leurs premiers enfants, des jumeaux, alors qu'elle même n'était encore qu'une enfant, les marqueront à jamais.

On est touchés par l'incapacité d'Hattie à montrer ses sentiments en particulier son amour pour ses enfants. On sent qu'elle regrette d'être une mère comme elle est, envahie par les problèmes d'intendance, de subsistance ne prenant pas le temps de jouer avec ses enfants quand ils sont petits alors qu'August, lui si peu présent dans la vie familiale, peut être leur héros quand il joue avec eux.
Elle a "fait de son mieux", reconnaissant elle même plus tard ne pas avoir su s'occuper de "l'âme de ses enfants".

On la trouve souvent très dure et on imagine la souffrance que cela a représenté pour chacun des enfants, celle ci transparait dans tous les récits des membres de cette tribu, tous sont en quête de l'amour de leur mère. Leurs parcours sont divers mais aucun ne trouve le bonheur, tous semblent à la dérive.
On cerne de mieux en mieux la personnalité d'Hattie au fur et à mesure des chapitres, les enfants la décrivent comme irascible, sévère, ne souriant jamais, en colère, éprouvant de la rage. Elle est certainement aussi malheureuse et souffre de solitude. Epuisée, elle n'a pas le temps pour les sentiments , il semble qu'elle n'ait connu le bonheur, relatif, qu'avec son amant Lawrence.
On perçoit très bien la tendresse qu'elle éprouve pour eux mais celle ci reste cachée derrière la dureté et ce n'est qu'à la fin de sa vie qu'elle se dévoile en volant au secours de certains de ses enfants.

On est frappés par la dignité d'Hattie qui est humiliée de recevoir l'aide sociale pour assurer la survie de sa famille à un moment donné de sa vie.

Il est émouvant de voir l'évolution de son couple avec August, l'apaisement vient à la fin de leur vie, chacun finit par s'appuyer sur l'autre.
La ségrégation, les agressions racistes, la peur et la colère des Noirs sont perceptibles tout au long du livre.

Un très beau moment de lecture. Les personnages de ce roman, où vivre signifie survivre, restent longtemps à l'esprit.
Livre à conseiller. 



Citations
"Peut-être n'avons-nous qu'une certaine quantité d'amour à donner. Nous venons au monde avec notre portion, et si nous aimons sans être suffisamment aimés en retour, elle s'épuise."

"Hattie voulait pour ses bébés des noms qui ne fussent pas déjà gravés sur la pierre d'une tombe familiale dans un cimetière, quelque part en Géorgie, alors elle leur donna à chacun un nom de promesse et d'espoir, un nom tourné vers l'avenir, pas vers le passé."

jeudi 26 novembre 2015

Mon traître de Sorj Chalandon

Date de parution : janvier 2008 chez Grasset
Nombre de pages : 276

Sorj Chalandon a été correspondant de guerre pendant plus de 20 ans et a longtemps travaillé sur le conflit irlandais.
Pour écrire ce roman il s’est appuyé sur sa propre histoire avec Denis Donaldson, l’un des leaders de l’IRA et du Sinn Féin, traître déclaré en décembre 2005, assassiné en 2006. 
Il dit avoir écrit cette histoire dans un but curatif. Au lieu de chercher à découvrir pourquoi son ami de 25 ans avait trahi, il a choisi de faire un  roman pour se rapprocher des interrogations qu'il a par rapport à cette trahison. Ce roman est donc très proche de l'épisode autobiographique.

"Mon traître" raconte donc l’amitié, jusqu’à l’aveu, entre un luthier français, Antoine, et Tyrone Meehan, un membre haut placé de l’Armée républicaine irlandaise (IRA).  Pendant 25 ans, Tyrone a travaillé pour les Britanniques, leur livrant des informations qui ont coûté des vies. Il s’agit d’une trahison en temps de guerre avec des conséquences car il y a eu mort d’hommes. Tyrone n'a pas seulement trahi son ami mais aussi sa famille, ses amis, ses camarades de lutte.

Antoine découvre l'Irlande lors d'une fête pour ses 30 ans chez un ancien ami. Quelques heures avant son retour à Paris, il se souvient d'une phrase d'un de ses clients : " Vous ne connaissez pas le Nord? Alors vous ne connaissez pas l'Irlande." Il décide alors de faire un tour à Belfast, un tour qui va changer sa vie...
Il va rencontrer Jim et sa femme qui l'invitent chez eux, puis Tyrone Meehan, activiste de l'IRA qu'il va bientôt considérer comme un père. Il va éprouver une sorte d'amour irraisonné pour ce pays et se rendre très régulièrement en Irlande du Nord.

Quand Antoine, double de Sorj Chalandon, apprend la trahison de Tyrone, il ressent un terrible choc, du désarroi puis de la colère et de la tristesse. Il s'interroge sur la réalité de leur amitié "Et notre amitié ? ... Elle était vraie ?".
Il se demande si Tyrone l'a utilisé pour ses activités d'espion, s'il est lui-même coupable d'avoir trahi la cause républicaine à laquelle il croit tant, en aidant Tyrone à se loger lors de ses séjours parisiens.

A la fin de ce roman la question du "pourquoi " de cette trahison reste sans réponse, quelques hypothèses sont juste émises.
Pour mieux comprendre les raisons de cette trahison, Sorj Chalandon a publié en 2011 "Retour à Killybegs", un roman qui complète "Mon traître", où il imagine la version de Tyrone, la défense après l'accusation en quelque sorte...

On retrouve dans "Mon traître" la puissance des romans de Sorj Chalandon avec des mots courts, précis, voire cassants qui vont à l'essentiel des faits et des émotions.

Cet amoureux de l'Irlande du Nord et de ses habitants chaleureux et simples a également une extraordinaire capacité à nous immerger dans l'atmosphère de l'Irlande avec ses pubs enfumés, ses gorgées de Guiness, la dignité et l'engagement des habitants de Belfast qui voient leurs enfants disparaitre par la guerre, la prison ou par une balle perdue.
On se retrouve immédiatement plongés dans l'atmosphère du conflit en Irlande du Nord avec, en point d'orgue, la mort de Bobby Sands après sa grève de la faim. Sorj Chalandon réussit à nous raconter 25 ans de conflit en Irlande du Nord par le prisme de cette trahison.

Un roman magnifique, sensible, pudique, riche en émotions, à lire absolument. 
Un vrai bijou... 


Citations
"Le salaud, c'est parfois un gars formidable qui renonce".

"La guerre est sale. Sale. Ne parle jamais de guerre propre".

"Il trahissait depuis près de vingt ans. L'Irlande qu'il aimait tant, sa lutte, ses parents, ses enfants, ses camarades, ses amis, moi. Il nous avait trahis. Chaque matin. Chaque soir…"


L'auteur
Sorj Chalandon est un journaliste et écrivain français né en 1952.
Il a été grand reporter puis rédacteur en chef adjoint au quotidien Libération de 1974 à  2007. Durant cette période il remporte le Prix Albert-Londres (1988) pour ses reportages sur l'Irlande du Nord et sur le procès de Klaus Barbie.
Depuis, il est devenu un auteur reconnu grâce à "Une promesse" en 2006 Prix Médicis, "Mon traitre" en 2008 Prix Joseph Kessel et en 2011 "Retour à Killibegs" couronné par le Grand Prix du roman de l'Académie Française.
Le prix Goncourt des lycéens lui est attribué pour "Le Quatrième Mur" en 2013.


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mercredi 25 novembre 2015

L'homme de la montagne de Joyce Maynard

 

Date de parution : août 2014 chez Philippe Rey
Nombre de pages : 319

Rachel et Patty sont 2 petites sœurs inséparables, libres et aventureuses, follement complices.
Leur mère, dépressive depuis son divorce s'isole dans ses livres, elle vit entre son travail, la bibliothèque et sa chambre, ne partageant pratiquement rien avec ses enfants. C'est une mère indifférente et négligente.
Livrées à elles même, le soir, elles passent de jardins en jardins pour regarder la télé, sans le son..., par la fenêtre des voisins. Espiègles, elles inventent sans fin des jeux dans la montagne jouxtant leur maison, laissant libre cours à leur imagination débridée, s'inventant des vies imaginaires.

Elles sont, toutes 2, fières de leur père, beau et charmeur. C'est un homme flamboyant qui aime les femmes, il est policier.

Une série de meurtres de femmes a lieu à proximité de chez eux durant l'été 1979 alors que Rachel a 13 ans et Patty 11 ans. Leur père est chargé de l'enquête et passe à la télé, le statut de fille de l'inspecteur médiatisé vaut à Rachel l'intérêt des filles de sa classe.
Pour aider leur père dans son enquête, elles s'improviseront détectives, inconscientes des risques encourus .

Ce livre n'est pas un polar avec des indices, des fausses pistes qui nous tiendraient en haleine. C'est le récit de l'amour fou de 2 filles pour leur père, de leur fierté pour leur père, sentiment qui se transformera en pitié quand il sera dessaisi de l'affaire et qu'il sombrera dans une sorte de déchéance. Leur désir de l'aider, de le réhabiliter ne s'en trouvera que renforcé.
C'est, plus que l'histoire du tueur, celle de deux adolescentes en prise avec l'image de leur père.

Beau récit bien écrit avec des personnages justes. 


Citations
"Il ne se passait jamais grand-chose sur le versant de la montagne où nous vivions et grandissions, Patty et moi. Et nous n’étions même plus abonnés à la télévision. En attendant qu’un événement inattendu survienne, nous inventions des situations. Le temps, c’était tout ce que nous possédions."

 
"Du seul mariage que j'avais observé de prés- celui de mes parents-, j'avais acquis une piètre opinion de cette institution. Le mariage, c'était la porte ouverte au divorce, et le divorce avait brisé le cœur de notre mère, éloigné notre père.....Si c'était à cela que menait le mariage: une femme qui ne serait plus jamais heureuse, quel besoin en avait- on? En tout cas plutôt être celle qui se tire que celle qu'on laisse......."


mardi 24 novembre 2015

Le dernier gardien d'Ellis Island de Gaëlle Josse




Date de parution : septembre 2014 aux Éditions Noir Sur Blanc
Nombre de pages : 176

Ellis Island est une île située au sud de Manhattan près de la statue de la liberté. Elle a abrité les services de l'immigration de janvier 1892 à novembre 1954. Y étaient accueillis les immigrants, candidats à l'entrée aux Etats Unis, ils y séjournaient le temps des formalités administratives, où le temps d'être soignés ou éventuellement expulsés. C'était la fameuse "Porte d'Or" pour eux.

John Mitchell est le gardien de ce centre dans lequel il a passé toute sa vie, entré simple employé, il en est devenu le directeur. Il entreprend d'écrire son histoire et celle du centre, histoires forcément imbriquées, durant les jours qui précèdent la fermeture du centre en novembre 1954 alors que lui même se trouve à la veille de prendre sa retraite. 
C'est un homme solitaire qui reste hanté par le souvenir de 2 femmes, Liz sa jeune femme décédée à 27 ans et Nella jeune immigrante italienne. Il reste envahi de culpabilité par rapport à son comportement envers Nella, n'en disons pas plus...

Il se plonge dans ses souvenirs et nous décrit la dureté du quotidien, la gravité des lieux et des situations. Il nous dresse des portraits d'immigrants et d'employés au comportement exemplaire ou indigne. J'ai particulièrement été marquée par le comportement de Sherman qui s'improvise photographe...

John est, quant à lui, un homme intègre, rigoureux mais certains actes de son passé font qu'il se perçoit comme un traite.

J'ai aimé ce livre pour son sujet original, pour l'originalité d'une intrigue campée dans ce centre de transit, "l'île aux 29 questions". L'écriture est fluide et agréable.
Le thème de l'immigration et des camps de transit restent malheureusement des sujets d'actualité brûlants.

lundi 23 novembre 2015

La petite fille qui avait avalé un nuage grand comme la tour Eiffel de Romain Puertolas


Date de parution : janvier 2015 aux éditions le Dilettante
Nombre de pages : 256

Après l'extraordinaire voyage du fakir qui abordait le problème des sans abris, Romain Puertolas a choisi la maladie pour thème de ce nouveau roman fantastique. Il s'agit de la mucoviscidose dont la description est très imagée mais, je pense, hélas si juste.

Dans ce livre qui exploite l'épisode du volcan islandais à l'origine d'un nuage de cendres qui a paralysé l'espace aérien il y a quelques années, nous allons faire de multiples rencontres pleines de charme avec des personnages hauts en couleur : un pirate chinois, le maitre 90 qui règne sur la caste des Mantes Tricoteuses, des moines à Versailles qui confectionnent des vêtements au fromage, Ping et Pong, Rachid le kiné, le sorcier sénégalais ...

Il est également amusant de voir ce récit émaillé d'événements de l'actualité récente (allusion au dernier gagnant de l'Eurovision par exemple...).
Romain Puertolas se livre aussi à une belle satire des hommes politiques avec un François Hollande et un Barack Obama exécutant un ballet des avions présidentiels pour remettre à Providence l'un la médaille du mérite, l'autre la médaille américaine de la paix...

La rencontre de Providence et de Zahera à l'hôpital de Marrakech est très émouvante, Providence offrant à cet enfant malade un ordinateur avec connexion internet pour lui ouvrir les portes du monde.

L' imagination débordante (et souvent délirante) de l'auteur nous fait vivre, entre autres, un étonnant jeu du lâcher de tartines mais nous livre également des réflexions sur notre monde où tout va trop vite, sur l'absurdité des conflits dans le monde avec 3 minutes de paix mondiale.

Romain Puertolas sait aborder des sujets délicats mais d’une manière légère et humoristique.
Ce livre qui ressemble au début à un conte finit dans la gravité avec un dénouement inattendu et émouvant.
Un petit bijou...


Citations
"Mais l'erreur est humaine. C'est pour cela qu'il y a des gommes au bout des crayons à papier."

"La vie c'était un peu comme la mayonnaise. Faite de choses simples, comme des jaunes d’œuf et de l'huile, et qu'il ne fallait surtout pas brusquer mais qu'un effort régulier transformait en le plus savoureux des mélanges."


Lu du même auteur



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dimanche 22 novembre 2015

Vernon Subutex 2 de Virginie Despentes



Date de parution : juin 2015 chez Grasset
Nombre de pages : 400

L'art de photographier le monde contemporain

Avec ce deuxième tome de Vernon Subutex (il y en aura trois), Virginie Despentes poursuit sa grande fresque de la société contemporaine.

Nous poursuivons les aventures du héros, Vernon Subutex que nous retrouvons là où nous l'avons laissé, SDF sur un banc.

Fort heureusement l'auteur nous fait, en début d'ouvrage, un petit rappel sur les différents personnages du premier tome. Nous allons les retrouver pratiquement tous. C'est bien pratique car les personnages sont nombreux et il est  souvent nécessaire de se reporter à cette liste en cours de lecture.  
On retrouve donc Vernon, l'ancien disquaire, dans la rue, dans un drôle d'état après une forte fièvre, il est déconnecté du monde et devient mystique. Installé dans le quartier des Buttes-Chaumont dans un bâtiment abandonné, il rassemble autour de lui une communauté hétéroclite composée de ses anciens amis et d'amis de la rue. 
Ils se retrouvent tous le soir autour de Vernon  dans le parc des Buttes-Chaumont, ou dans un bar, le Rosa, où Vernon mixe certains soirs

Le contenu de la fameuse cassette que le rockeur Alex Bleach a laissée chez Vernon avant de mourir est enfin dévoilé, mais là n'est pas l'essentiel…

Quelques personnages dominent ce deuxième tome, Selim et sa fille Aïcha, très émouvants et Charles le SDF.

Virginie Despentes aborde avec toujours autant d'acuité des thèmes importants comme ceux de l'argent, de l'Islam, du mariage pour tous, de la politique (les trahisons de la gauche, la montée des extrêmes…), des réseaux sociaux, de la maternité ou de la vie conjugale, de l'amitié, de l'amour… A noter de très beaux passages sur le chagrin d'amitié.

Ce deuxième tome est moins noir que le premier. Virginie Despentes, d'une écriture toujours aussi vive, fluide et pertinente, nous brosse le tableau d'une vie communautaire idéale, solidaire autour d'un Vernon apaisé.

J'attends maintenant avec impatience le tome 3 pour voir où Virginie Despentes va nous emmener cette fois...


Citations
"Beaucoup de gens disent qu'ils s'assagissent avec l'âge. En vérité, ils se tassent, ils ralentissent. Ils perdent de leurs saillances. Ils s'enlisent dans un sable mou et s'enfoncent en toute confiance. C'est ce qu'on appelle mûrir." 

"Les mails sont devenus un véritable problème pour lui. Que faisait-on de tout ce temps, dans les années 90, qu’on ne passait pas à répondre aux courriels?"

"Si on veut se mettre en couple, l'important c'est d'être réaliste. Une fille mettable, qui fait à bouffer, qui n'a aucune habitude dégoutante et te supporte tel que tu es, sans chercher à te mettre au pas et te faire aimer les légumes verts, on ne peut pas en demander beaucoup plus à l'amour. A quelques détails près, c'est toujours la même histoire qu'on se raconte. L'important, c'est de ne pas s'acharner à chercher dans la vie de couple des choses qu'on n'y trouvera jamais."


L'auteur
Virginie Despentes est romancière et réalisatrice française née en 1969. Elle est également ponctuellement parolière et traductrice.

Elle a fait tous les métiers : femme de ménage, hôtesse dans un salon de massage, pigiste pour des journaux rock et porno, vendeuse.

Sa chance tourne avec la publication de ses deux romans : Baise moi en 1993 et Les Chiennes savantes en 1995. Elle est traduite en plus de dix langues. En 1998, son roman "Les jolies choses"  reçoit le Prix de Flore et "Apocalypse bébé" reçoit le Prix Renaudot en 2010.
Elle est l'un des symboles de la littérature "trash" française.











Lu du même auteur





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samedi 21 novembre 2015

Un secret de Philippe Grimbert


Date de parution : mai 2004

Prix Goncourt des lycéens 2004
Grand prix des lectrices Elle 2005

Roman autobiographique captivant qui se lit d'une traite.
C'est l'histoire d'un enfant, fils unique, né malingre alors que ses parents sont des athlètes. Il se sent "faible, incapable, inapte" et s'invente un frère imaginaire qui est tout son contraire.

Un tournant se produit dans son existence à l'âge de 15 ans avec la découverte de son identité de juif et du passé de ses parents. Le livre bascule à ce moment là, impossible d'en dire plus pour laisser l'effet de surprise. L'histoire prend sa vraie dimension à ce moment-là, captivante...
Il découvre ce que cachaient les silences de ses parents et leur culpabilité. Ce secret découvert va le libérer mais il ne va pas en parler pendant très longtemps à ses parents pour les protéger.

Une histoire d'amour tragique qui ne peut que nous émouvoir...jusque dans ses dernières pages.

Citations
"Je ne pouvais pas savoir qu'on ne gagne jamais contre un mort"

Cette lecture rentre donc a posteriori dans le Challenge Goncourt des Lycéens et le Challenge Prix des lectrices Elle d'Enna
                                                    



jeudi 19 novembre 2015

L'homme qui ment de Marc Lavoine


Date de parution : janvier 2015 chez Fayard
Nombre de pages : 240



Marc Lavoine raconte son enfance entre un père communiste, cégétiste et une mère qui désirait une fille et l'élève de la sorte. Il nous fait partager sa vie dans un monde de gens humbles et solidaires engagés à gauche.
Son père est un homme fantasque et drôle. De retour d'Algérie, il veut profiter de la vie sous tous ses aspects, il rend sa femme malheureuse en jonglant en permanence entre une femme, 3 maitresses attitrées et des filles de passage.... Il cherche la complicité de ses fils en leur racontant ses aventures.

Il est émouvant de voir que Marc Lavoine ne juge jamais son père même si les situations dans lesquelles celui-ci le met sont difficiles à vivre. Quand sa mère demande le divorce, se tient à l'écart de cette histoire qui pour lui ne concerne que ses parents. Il se montre très lucide et a remarquablement su se protéger.

Avec sa belle écriture poétique, Marc Lavoine nous fait découvrir sa plume d'écrivain dans ce livre-hommage à ses parents.  


Citations
"Elle était en deuil pour de vrai, elle était libre et profondément elle-même, nue de toute rancune;
toute sa vie était là, présente;
Car même après le divorce, après t'avoir aimé autant que détesté, tu étais resté le seul homme de sa vie, sa seule histoire d'amour, et j'ai la faiblesse de croire qu'il en était de même pour toi."

"Il fallait que je me protège, car cette histoire, avant d'être la mienne, était surtout la leur, celle de mes parents. Titi et moi, il nous fallait mûrir, désormais coupés en deux. Nous devions nous construire sans protection, sans garde-fous, sans rien."

mercredi 18 novembre 2015

Alabama song de Gilles Leroy lu par Fanny Ardant


Date de parution : août 2007 chez Mercure de France
Durée de l'audiolivre : 5h

Prix Goncourt 2007

Un naufrage annoncé

Gilles Leroy se  met dans la peau de Zelda Sayre, épouse de Francis Scott Fitzgerald, célèbre écrivain américain, auteur notamment de Gatsby le magnifique.
Le récit est constitué des souvenirs de Zelda entrecoupés de dialogues avec les multiples psychiatres qui l'ont soignée. L'auteur mêle éléments biographiques et imaginaires en mélangeant les époques, ce livre est un roman, pas une biographie.
Zelda, "belle du Sud" très courtisée, est la fille d'un Juge de la Cour Suprême, la petite fille d'un sénateur et d'un gouverneur. Considérée comme une "poupée blonde" par sa mère, un  "diable à tête blonde" pour une partie de la ville de Montgomery dans l'Alabama, elle déteste son père qu'elle nomme "le juge" et veut quitter sa région "un cimetière des ambitions". Elle rêve d'une vie de gloire et de célébrité.

Elle rencontre le lieutenant yankee Scott, beau, séducteur, "buveur, boxeur et dilettante" dont le père est ruiné. Il veut prendre sa revanche et devenir l'écrivain le plus célèbre des États Unis.
Ce sont deux gosses semblables jusque dans leur physique, mondains, gâtés et insatiables.
Les deux familles désapprouvent le mariage, la propre famille de Zelda n'y assiste pas. 

Le premier roman de Scott a un succès retentissant. Ils forment alors un des couples les plus en vue des années 20, vivant d'hôtels en hôtels dans un tourbillon, assidus aux soirées mondaines.
Un couple ambitieux, orgueilleux qui se déchire très vite, Zelda devient accro à la morphine, vit dans l'ombre de Scott qui connait le succès mais qui alimente ses romans des écrits pillés dans le journal et dans les lettres de sa femme. Zelda se sent "piégée, abusée, dépossédée", elle en vient à cacher ses écrits pour qu'il ne les lui vole pas. Il publie sous son nom des nouvelles qu’elle a écrites sous prétexte qu'elles se vendront mieux. "Écrire est une affaire d'hommes. De droit divin, écrire revient aux hommes".
Elle essaye vainement de s’accomplir au travers de la danse et de la peinture mais ne parvient pas à avoir une existence artistique propre. Elle qui avait imaginé que s'enfuir avec Scott lui donnerait la liberté se retrouve cantonnée dans un rôle de top model qu'on exhibe, son mari ne lui laisse pas une chance de s'émanciper en lui permettant de publier ses écrits.

Zelda rencontre un aviateur qui devient son amant et s'enfuit un mois avec lui. Scott la fait enlever, l'enferme et la contraint à l'avortement. Elle dit vivre alors sous "l'emprise d'un mari jaloux, névrosé et perdu".
Scott, quant à lui, perd de sa notoriété, sombre dans l'alcoolisme et vit une relation  homosexuelle avec Lewis (Hernest Hemingway) qui exerce une influence désastreuse sur lui, Zelda  voit Lewis comme un mauvais génie qui a contribué à la destruction de leur couple trop fragile.

Rattrapée par le délire, la folie, Zelda va passer sa vie d'internement en internement, subissant lobotomie, bains d'eau glacée, séances d'électrochocs...

Zelda résume ainsi son histoire "Scott et moi nous avions besoin l'un de l'autre et chacun a utilisé l'autre pour parvenir à ses fins... mais cette entreprise à deux ce n'est pas de l'amour".
 "Vous vouliez la réussite pour vous comme pour lui. C'est un désir qui vous consume, cette folie de réussir. Vous ne vous êtes pas mariée vous avez signé un contrat publicitaire" lui dit son médecin.

Luttant tous les deux sur le même terrain, celui de la célébrité, ils ont fini par se détruire.

A travers l'histoire de ce couple, l'auteur pose la question de l'emprise d'un compagnon jaloux, autoritaire et névrosé, la question de la possibilité d'un épanouissement personnel aux côtés d'un créateur.
Cette histoire est intéressante, triste, voire bouleversante par moments  et bien écrite mais n'a pas, selon moi, l'envergure d'un prix Goncourt. En 2007, Philippe Claudel récompensé par le Goncourt des lycéens pour le rapport de Brodeck avait signé un texte d'une toute autre portée.
Comme souvent le choix des lycéens est de qualité....

Fanny Ardant, comme à son habitude, avec sa voix si chaude, presque envoûtante, sert magnifiquement ce texte.



Citations
"J’aime le péril… les précipices…, les dés qu’on jette étourdiment en pariant sa vie entière, et je n’attends même pas qu’ils aient fini de rouler pour décider de ma ruine. Me perdre, j’aime aussi, à l’occasion. C’est moi. Rien ne m’en guérira."

"Les garçons des clubs, les jeunes officiers du mess, je les tiens dans ma main gantée de fil blanc. Je suis Zelda Sayre. La fille du juge. La future fiancée du grand écrivain.
Du jour où je l'ai vu, je n'ai plus cessé d'attendre. Et d'endurer, pour lui, avec lui, contre lui."

"Les hommes trop beaux sont le fléau des femmes."

"Ce qui nous a rapprochés? L'ambition, la danse, l'alcool. Ce désir bleu de briller."


L'auteur


Gilles Leroy est  né en 1958.
Journaliste, il publie son premier roman en 1987.
Il se consacre complètement à l'écriture depuis 1996.







Fanny Ardant née en 1949 est une actrice et réalisatrice française.










mardi 17 novembre 2015

Le manteau de Greta Garbo de Nelly Kapriélian



Date de parution : août 2014 chez Grasset
Nombre de pages : 288


Je ne m'attendais pas du tout à ce genre de livre en le prenant à la bibliothèque. Pourquoi dit-on que c'est un roman alors que, pour moi, c'est plutôt un essai?

Un essai sur le vêtement de la femme comme révélateur de son identité, comme reflet du désir de l'homme. La question de l'influence du vêtement dans le cinéma est aussi abordée mais tout ça dans un fouillis indescriptible. 

De belles phrases de temps en temps dans ce livre très documenté mais une écriture fatigante à lire...
Je n'ai pas réussi à aller jusqu'au bout de ce pensum...


Citations 
"Sur mon lit de mort, quel regard jetterai-je sur la vie que j’avais eue : me sentirai-je heureuse parce que tel soir, j’étais la femme la mieux habillée du restaurant où il m’invitait ?"

"Écrire, couper, monter, assembler, coudre : le couturier a des gestes communs avec le chirurgien, le cinéaste et l’écrivain."

lundi 16 novembre 2015

Une promesse de Sorj Chalandon



Date de parution : août 2006 chez Grasset
Nombre de pages : 288

Prix Médicis 2006 

Ces âmes qui résistent...

J'ai lu ce livre car j'avais envie de connaître tout ce qu'a écrit cet auteur depuis que je l'ai découvert avec "Le quatrième mur" (sublime) et Profession du père" (bouleversant).
Je n'ai vraiment pas été déçue par ce texte complètement différent de ceux que j'avais déjà lus.

C'est une magnifique histoire de deuil, une sorte de conte, écrite d'une plume très sensible et poétique.

Nous sommes en Mayenne mais la Bretagne est en arrière-plan avec sa mer qui peut engloutir des marins.
Depuis 10 mois, 7 amis rendent visite à Étienne et Fauvette dans leur maison Ker Ael chacun un jour différent de la semaine. Chacun a un rôle à jouer lors de sa visite : sonner la cloche, allumer la lumière, mettre des fleurs, ouvrir les rideaux, remonter l'horloge...
Ils tiennent la promesse qu'ils se sont faite entre eux et avec Lucien, dit Bosco, le jeune frère d'Etienne. Chaque visite est ensuite consignée dans un cahier au bar de Bosco qui leur sert alors "le vin de promesse".
Ce sont des gens simples, au passé parfois tourmenté, la plupart sont âgés, la plupart sont des amis d'enfance.
Des flash back réguliers nous éclairent sur la vie de chacun, sur leur enfance commune, sur leurs liens avec Etienne et Fauvette...

Ce récit parait étrange au départ mais il prend rapidement aux tripes sans être pour autant triste. Il est tout simplement sublime jusqu'à la dernière page.
C'est une magnifique histoire de deuil, d'amitié et de fidélité très joliment écrite.
Sorj Chalandon devient vraiment mon auteur homme favori.


L'auteur
Sorj Chalandon est un journaliste et écrivain français né en 1952.
Il a été grand reporter puis rédacteur en chef adjoint au quotidien Libération de 1974 à  2007. Durant cette période il remporte le Prix Albert-Londres (1988) pour ses reportages sur l'Irlande du Nord et sur le procès de Klaus Barbie.
Depuis, il est devenu un auteur reconnu grâce à "Une promesse" en 2006 Prix Médicis, "Mon traitre" en 2008 Prix Joseph Kessel  et en 2011 "Retour à Killibegs" couronné par le Grand Prix du roman de l'Académie Française.
Le prix Goncourt des lycéens lui est attribué pour "Le Quatrième Mur" en 2013.


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