Date de parution : avril 2016 chez Grasset
Nombre de pages : 208
Un titre fort pour un ouvrage entre fiction et document dénonçant les
aberrations des systèmes islamiques radicaux envers les femmes.
Ce livre est un véritable coup de poing!
Ce livre, au titre fort, est une sorte d'essai politique, mélange de réalité et de fiction, dans lequel l'auteur dénonce le sort réservé aux femmes en
Iran, pays où la prostitution est partout.
Chahdortt Djavann, romancière et essayiste franco-iranienne, a fui l'Iran de Khomeini pour trouver refuge en France pour avoir refusé à 13 ans de porter le voile. En juin 1980, elle est arrêtée devant son collège. Insultée, tabassée et emprisonnée, elle en sort défigurée avec deux côtes cassées. deux de ses meilleures amies sont exécutées.
Chahdortt Djavann part d'un fait divers réel : dans plusieurs grandes villes iraniennes, des
prostituées sont retrouvées mortes, étranglées avec leur propre tchador. Dans ce pays où les mollahs rendent la justice, pour la plupart des gens les assassins de prostituées sont de bons musulmans, des éradicateurs de femmes au "sang sans valeur", des purificateurs. Nous sommes dans un pays où, selon l’islam, les femmes mariées qui se prostituent sont condamnées à la lapidation.
Chahdortt Djavann nous parle des "tchadors clignotant" qui s'ouvrent furtivement à chaque coin de rue, "Elles
portent le hijab le plus sévère et parviennent à se prostituer sans
montrer la plus infime parcelle de leur corps. Du grand art !". En effet, dans ce pays, la prostitution est omniprésente, liée au chômage ou au
trafic de drogue.
L'auteur choisit le prisme de la fiction avec Soudabeh et Zahra, deux gamines magnifiques, deux amies que la vie sépare, mais qui finiront dans le même
enfer : celui de la prostitution.
Elle complète son récit avec des témoignages d'outre-tombe de dizaines de prostituées assassinées, de vrais-faux témoignages inspirés d’un documentaire
réalisé suite aux meurtres en série.
L'auteur donne la parole à ces femmes et parle du désir des femmes, c'est puissant, érotique et tragique, chaque témoignage se termine de la même façon
Shahnaz
Naissance : 12 juillet 1981 à Ispahan
Lapidée le 25 septembre 2012 à Ispahan
Avec ce livre Chahdortt Djavann dénonce une immense hypocrisie : au
pays des mollahs, de la morale rigoriste sans compromis, la prostitution
est une institution nationale.
Le langage est cru, percutant, rempli de rage, on ressent la colère de Chahdortt Djavann à chaque page. La lecture en devient oppressante, dérangeante mais c'est la réalité qui est dérangeante.
Je ne peux que louer son courage, son talent et son roman inoubliable.
A lire absolument.
Citations
"Dans la capitale iranienne, comme dans toutes les grandes villes en Iran, selon divers témoignages et enquêtes, le temps qu'une femme, une adolescente, une fillette ou une prostituée se fassent accoster, soit par un client, soit par un proxénète avisé ou une maquerelle à l’œil perspicace, soit par un criminel, ou par un gardien du régime - ce qui reviendrait au même - est estimé en moyenne, à trois minutes."
"Ces femmes en tchador doivent être totalement invisibles, comme il se doit, et provocantes : ne pas se faire remarquer par les agents de la morale islamique et attirer les éventuels clients. Tâche ardue et contradictoire."
"Il est primordial de savoir que, selon la législation islamique en vigueur en Iran depuis l'instauration du régime khomeinyste en 1979, la prostitution est un crime dont le châtiment est la peine de mort. Et si la prostituée est mariée, elle est condamnée à la lapidation. Cette loi est écrite noir sur blanc et attribuée, comme toujours, à la volonté d'Allah, sans que l'on ait demandé l'avis de ce dernier."
L'auteur
Née en 1967 en Iran, Chahdortt Djavann grandit à Téhéran où elle vit
avec sa mère et ses quatre frères et sœurs aînés. Son père, Pacha Khan,
est emprisonné par le shah, après la révolution de 1979.
Très jeune, c’est l’exil : après être passée par Istanbul, elle atterrit
à Paris en 1993. Ne parlant pas français, elle connait des conditions
de vie difficile, enchaînant les jobs précaires, avant de rentrer à l’école des Hautes études en sciences sociales, où elle étudie
l’anthropologie.
En 2002, elle publie son premier roman, "Je viens d’ailleurs" et raconte
comment elle a gardé la tête haute. Un an plus tard, "Bas les voiles !"
pamphlet s’élevant contre le port du voile lui vaut
une notoriété subite.
En 2003 elle reçoit le Grand prix de la Laïcité et en 2004 le Chevalier des arts et des lettres.
Merci à Zélie et aux Éditions Grasset pour m'avoir permis de découvrir ce livre en avant première.
Catégorie GROS MOT