Pages

mardi 15 janvier 2019

Des hommes couleur de ciel d'Anais Llobet

Date de parution : 9 janvier 2019 aux éditions de l'Observatoire
Nombre de pages : 224 

Oumar, un tchétchène, devenu Adam en s'installant à la Haye est  un "homme couleur de ciel" car dans son pays il n'existe aucun mot pour désigner son homosexualité. Il a quitté son pays pour pouvoir vivre sa différence. Aux Pays-Bas, il passe son baccalauréat et tente de vivre librement tout en dissimulant sa nouvelle vie à son jeune frère, Kirem, qui lui ressemble comme un jumeau.

Un jour, peu après l'arrivée de Kirem et de leur cousin Makhmoud à La Haye, Oumar apprend qu'un attentat vient d'avoir lieu dans son ancien lycée. Vingt-deux élèves et deux professeurs ont été tués par deux bombes placées sous les tables de la cantine. Un tchétchène est suspecté d'être à l'origine du massacre... Oumar est alors mêlé à l'impensable... Interrogé par la police, le jeune homme a un alibi mais il lui est impossible d'en parler.

Alissa, professeure de russe dans ce lycée, est une tchétchène devenue Alice depuis qu'elle s'est installée en Hollande, pays de liberté et de tolérance, elle multiplie depuis dix ans les efforts pour s'intégrer. Elle a menti sur ses origines pour mieux s'intégrer et se prétend russe aussi bien auprès de ses collègues que  de  son compagnon. Cet attentat est pour elle une irruption du passé qu'elle cherche à refouler la plongeant dans la violence qu'elle a fui, son pays d'accueil est soudain atteint par la même barbarie que son pays natal... Alissa partage la langue et le passé de celui qui a endeuillé le pays, la police veut donc l'utiliser comme interprète. Il lui faut coopérer pour ne pas devenir suspecte, Alissa est à la fois tenaillée par l'impression de trahir son peuple et la culpabilité de ne pas avoir perçu la radicalisation d'Oumar, son élève préféré.

Cette histoire de deux frères tchétchènes exilés aux Pays-Bas est passionnante, Anaïs Llobet y mêle habilement le destin de trois personnages réfugiés à La Haye. Ce roman parle de différence, d'exil, d'intégration, de quête d'identité et d'intolérance, du poids de la culture et de la famille, de l'homosexualité tabou passible de mort dans la communauté tchétchène, de la possibilité d'être soi et de choisir sa vie. Il évoque l'histoire de la Tchétchénie, la guerre contre les russes, la culture tchétchène, les règles ancestrales et l'honneur lavé dans le sang. Tout est réussi dans ce roman : l'écriture sans fausse note, le style fluide, la construction parfaite, la tension et les rebondissements qui maintiennent en haleine, les personnages forts dont les failles sont exprimées avec finesse, le bien joli titre et la magnifique couverture. Un grand roman qui pose des questions qui ne peuvent nous laisser indifférents. Embarquée dès les premiers mots du récit, il m'a été impossible de le lâcher avant d'avoir tourné la dernière page. 


Citations
" L'exil se vit seul."


L'auteure
Anaïs Llobet est journaliste. En poste à Moscou pendant cinq ans, elle a suivi l’actualité russe et effectué plusieurs séjours en Tchétchénie, où elle a couvert notamment la persécution d’homosexuels par le pouvoir local. Elle est l’auteure d’un roman, Les Mains lâchées (2016). (Sources : Éditeur)



Lu de cette auteure 




pour accéder à ma chronique, cliquer ici 







3 commentaires:

  1. Ouh la la, trois critiques lues sur les blogs, trois coups de coeur ! Ca sent l'excellent roman...

    RépondreSupprimer
  2. ravie de lire un 2e avis enthousiaste (après celui de Nicole) sur ce livre...je vais le lire ! :)

    RépondreSupprimer