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dimanche 4 septembre 2022

Sa préférée de Sarah Jollien-Fardel


Date de parution : aout 2022 chez Sabine Wespieser
Nombre de pages : 208

PREMIER ROMAN

Dans un village haut perché des montagnes valaisannes, tout se sait et personne ne dit rien. La narratrice Jeanne doit faire face à la brutalité perverse de son père, sa mère et Emma, sa sœur aînée, se résignent à la violence verbale et physique que leur inflige le père qui fait régner un climat de terreur dans la famille. Jeanne lui tient tête mais un jour, pour un mot de trop, son père la tabasse pour la première fois. Elle a huit ans et pense que le médecin du village, appelé à son chevet, va intervenir et mettre fin à leur calvaire. Mais il se tait comme se taisent les enseignants, les voisins qui font tous preuve d'une lâcheté qui foudroie la petite fille 

Dès lors, la haine de son père ne quittera plus Jeanne "Je suis en guerre. Depuis toujours. Pour toujours". Cinq années à l'Ecole normale d'instituteurs, à distance de chez elle, lui offrent un peu de répit mais le suicide de sa sœur aînée la replonge dans l'horreur.

La narration à la première personne sous la forme d'un monologue de Jeanne contribue à la force de ce roman. La dureté du texte tient à la violence que le père fait subir à sa famille mais aussi à l'enfermement de Jeanne dans une colère, une haine et une volonté de ne rien oublier qui la détruisent. Cet enfermement, cet empêchement sont le sujet central du roman.

Comment peut-elle s'en sortir quand les années, la distance, des séances de thérapie, l'aide de ses amis, ne parviennent pas à la libérer de ses tourments de façon durable ? "Emmurée dans ma haine, sans concession, à ressasser toujours les mêmes souvenirs. Incapable de pardon... Je me gargarise de la violence de mon père alors que je devrais grandir."  Comment ce qu'elle a vécu ne peut-il pas avoir une influence sur sa construction, sur sa sexualité d'adulte ? 

L'auteure restitue parfaitement la violence, l'inculture, l'obscénité verbale, la bestialité paternelles qui engendrent une misère familiale dont Jeanne réussit à s'extraire en s'isolant dans les livres et les devoirs.  L'ambivalence des sentiments de Jeanne envers sa mère est bien analysée, entre amour et colère contre sa soumission à son mari. Jeanne éprouve de la honte, des remords et de la culpabilité de devoir rejeter sa mère " Je lui en ai voulu si souvent, presque autant qu'à mon père, de ne pas partir, de ne pas fuir."

Une héroïne forte et orgueilleuse qui a réussi à tenir debout face à son père, une femme pourvue d'un instinct de survie qui lui a permis de fuir, une femme qui tentera de trouver l'apaisement auprès de personnes bienveillantes et d'un lieu qui sait la calmer : le lac de Lausanne.

Une écriture âpre, une histoire forte bien menée, des personnages marquants, une analyse fine des sentiments, des lieux, montagnes valaisannes et Lausanne, particulièrement prégnants, des scènes très fortes qui seront difficiles à oublier et un dénouement qui serre le cœur. Un premier roman coup de poing qui soulève quantité de questions essentielles. Une vraie réussite.


Citations

" Il a confisqué toutes nos allégresses. Il a massacré toutes nos jouissances."

" Les fondations de mon enfance ne sont pas assez solides pour que je tienne debout."

"Je découvre ce que mes parents auraient dû me donner : une identité. La mienne, je l'ai créée, pleine de haine et de pourriture."


L'auteure


Née en 1971, Sarah Jollien-Fardel a grandi dans un village du district d'Hérens, en Valais. Elle a vécu plusieurs années à Lausanne, avant de se réinstaller dans son canton d'origine avec son mari et ses deux fils. Devenue journaliste à plus de trente ans, elle a écrit pour bon nombre de titres. Elle est aujourd'hui rédactrice en chef du magazine de libraires "Aimer lire". Les lieux qu'elle connaît et chérit sont les points cardinaux de son premier roman. (Source : éditeur)



1 commentaire:

  1. D'accord avec vous pour la "dureté du texte".
    La fin du roman, désespérante, m'a déçu...
    (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola

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