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jeudi 21 septembre 2017

La tête et le cou de Maureen Demidoff


Date de parution : août 2017 aux éditions des Syrtes
Nombre de pages : 213

J'ai lu ce document dans le cadre de ma participation au Grand prix des Lectrices Elle 2018, il a été sélectionné par le jury de septembre.

L'auteur a interviewé des femmes représentantes de trois générations issues de milieux et d'univers différents. Il s'agissait d'interviews libres sans que l'auteur ne pose trop de questions, le but était que ces femmes lui racontent leur Russie. Le titre qui provient d'un proverbe russe est cité par l'une des femmes "L'homme est la tête et la femme est le cou. La tête ne bouge que grâce au cou qui la commande."

L'Histoire de la Russie est bien entendu en toile de fond de ces témoignages avec les bouleversements énormes que ce pays a connu, de l'empire de Nicolas II, période qu'ont connue les grands parents de certaines femmes à la chute de l'Union Soviétique, la perestroïka puis la période Poutine.
Ce texte n'est pas sans me rappeler  La fin de l'homme rouge et  La supplication, chroniques du monde après l'apocalypse de Svetlana Alexievitch, prix Nobel de littérature. J'y ai retrouvé la peur qui étreint les habitants d'un pays où tout le monde fait des rapports sur tout le monde, les cuisines comme seuls lieux où les familles peuvent parler librement, l'uniformité et le manque de liberté qui caractérisaient la vie du temps de l'URSS... mais aussi un sentiment patriotique très fort et la nostalgie de l'avant perestroïka pour le plus jeunes, nostalgie pour l'époque de l'Union soviétique, pays riche et puissant composé de quinze républiques amies. 

Les hommes sont la plupart du temps décrits par ces femmes comme lâches, fainéants, alcooliques et souvent violents. Les femmes se voient battantes, courageuses, très fortes et responsables de tout, tout le temps. "Nous savons ce qu'est une crise, on s'en remettra. Nous allons faire comme d'habitude : d'abord on va chanter, ensuite on va penser, et après on va se battre" et parlent du savoir-survivre qu'elles opposent au savoir-vivre français. Plusieurs d'entre elles font référence à Poutine, leur modèle d'homme fort et viril...

Le récit se termine par la voix d'un homme, un  psychanalyste qui tente d'analyser les propos des femmes, il revient sur la faiblesse de l'homme russe qu'elles évoquent et souligne le besoin de la femme russe, contrairement aux femmes occidentales, de s'appuyer sur un homme fort. Il recherche les origines de l'image très traditionnelle et patriarcale de la structure familiale qu'ont les femmes russes et émet quelques hypothèses. 

Ces quatorze témoignages nous brossent de beaux portraits de femmes, j'ai cependant regretté qu'ils aillent tous dans le même sens. J'ai été frappée par leur regard dur sur les hommes, leur absence totale d'indulgence envers eux. Ces témoignages restent cependant intéressants malgré leur uniformité, ils sont fort judicieusement encadrés par un avant-propos de Maureen Demidoff, par une post-face d'Hélène Yvert-Jalu, spécialiste de la femme soviétique et post-soviétique et par l'analyse du psychanalyste. Ces chapitres sauvent l'ensemble du texte de sa monotonie, ils offrent une analyse intéressante des propos des femmes interviewées en les resituant dans leur contexte historique, politique et social. La voix de quelques hommes autres que le psychanalyste, qui s'exprime en tant que praticien et non en tant qu'homme, manque selon moi à cet ouvrage pour mieux nous éclairer sur les relations hommes-femmes en Russie.


Citations
" En France, il y a le fameux savoir-vivre reconnu dans le monde entier, mais en Russie, nous avons le savoir-survivre. La femme russe doit tous les jours savoir survivre pour faire tourner la maison, en restant une femme élégante, même sans chaussures italiennes et sans jolie lingerie!".

" Elles ne font pas de leurs petits garçons des soldats et les surprotègent. Pourquoi agissent-elles ainsi alors qu'elles sont conscientes de la faille? Parce qu'aucune maman au monde ne traite son enfant comme le futur mari de qui que ce soit."

" L’État, c'est la pouvoir. On vit pour sa patrie, on peut même mourir pour elle, mais on ne peut pas mourir pour l’État." 


L'auteur


Maureen Demidoff est journaliste. Elle a vécu 8 ans à Moscou, où elle a fondé en 2010 le site Russieinfo.com dont elle est responsable éditoriale.
Elle est également correspondante freelance du journal belge L’Écho. 




 

25ème participation au Challenge Rentrée Littéraire 2017











2 commentaires:

  1. Je l'avais noté et tu confirmes

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    1. Voilà une lecture qui sort de nos lectures habituelles. Un des avantages de participer au jury Elle...

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