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mardi 26 janvier 2021

Over the rainbow de Constance Joly


Date de parution : janvier 2021 chez Flammarion
Nombre de pages : 192

Constance Joly entreprend avec ce nouveau livre de raconter son père, elle va être la "monteuse de son histoire" mais aussi "la menteuse, celle qui comble les vides, synchronise gestes et paroles. Celle qui rejoue le passé."

Son père Jacques a "cadenassé ses rêves", refoulé son vrai moi, le visage de cire le jour de son mariage avec Lucie il est devenu un mari puis un père. Mais après avoir "nagé à contre-courant jusqu'à ses trente-sept ans" il a trouvé enfin la force d'être lui-même en cédant à son désir pour les hommes. C'était en 1976 à une époque où l'homosexualité était considérée comme une maladie mentale, un délit passible de prison. Constance a alors huit ans, ses parents se séparent et elle vit partagée entre sa mère et le couple formé par son père et Ivan. Mais en 1981 apparaissent les premiers cas de Sida, Jacques sera un des premiers atteints, il mourra en 1991 mais refusera jusqu'au bout de parler de sa maladie même lorsqu'il aura des symptômes, ce n'est qu'à la toute fin que Constance apprendra la vérité.  

"J'écris pour ne pas tourner la page. J'écris pour inverser le cours du temps.
J'écris pour ne pas te perdre pour toujours. J'écris pour rester ton enfant."

Ce roman est un hommage de Constance Joly à son père, elle s'adresse à lui de façon très émouvante, la douleur, le manque et l'amour sont omniprésents. Il est vertigineux pour elle de penser qu'elle doit la vie au fait que son père ait refoulé son homosexualité. "Je vis grâce à l'histoire que tu avais voulu raconter au monde, je vis grâce à la fiction."

Elle trouve les mots justes pour décrire la souffrance de sa mère abandonnée pour un homme, les questions qui minent son père quant à son droit à vivre sa vie et à s'affranchir de son ancienne vie, sa solitude de petite fille à qui on n'explique rien. Elle décrit son père qui s'épanouit dans sa nouvelle vie, la liberté de cette époque et l'émergence de l'épidémie, la honte et le silence qui entouraient le Sida comme une chape de plomb à cette époque où cette maladie était cachée car elle faisait peur. Le Sida, une maladie taboue synonyme d'exclusion, de haine ou de pitié.

J'ai aimé le regard que la femme de 50 ans qu'elle est devenue porte sur la jeune femme de 20 ans qu'elle était quand elle s'est retrouvée confrontée à l'inimaginable, une jeune femme déchirée par ses propres histoires d'amour "Je ne suis qu'un cœur affamé. Je n'ai pas de place pour un père." Elle évoque ses regrets de ne  pas avoir su prendre assez en compte la maladie de son père, sa terreur et son chagrin. Elle regrette d'avoir gardé "le cœur verrouillé, le cœur comme un fourré de ronces" et de n'avoir pas laissé fondre sa cuirasse car elle était "au présent éternel de sa jeunesse"

L'amour qui a uni Constance, Jacques et Lucie jusqu'au bout est très beau. Un texte autobiographique à la fois intime et universel d'une infinie délicatesse, d'une grande pudeur, d'une belle élégance. C'est doux, c'est tendre, c'est poétique, c'est très beau. Un arc-en-ciel de mots qui la relie à son père.


Citations 

" C'est l'histoire de nos mains. Hier, quand tu comptais mes doigts à la maternité, aujourd’hui, sur ton lit de mort, où je les tiens."

" Faire tomber les fictions successives que tu t'es construites pour tenir en équilibre."

" Au Japon, on dit que lorsqu'une personne vous apparait en rêve, ce n'est pas vous qui pensez à elle, c'est elle qui pense à vous."

" Le silence est le pire des bourreaux. Le déni est plus terrible que n'importe quelle vérité."


L'auteure


 

Constance Joly travaille dans l’édition depuis une vingtaine d’années et vit en région parisienne. Le matin est un tigre, son premier roman (Flammarion, 2019), a été très bien accueilli par la critique et les libraires. (Source : éditeur)

 

 

 


Lu de cette auteure

 

 

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