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lundi 8 avril 2024

La disparition d'Hervé Snout d'Olivier Bordaçarre

 

Date de parution : janvier 2024 chez Denoël
Nombre de pages : 368

" Si les abattoirs avaient des murs en verre, tout le monde serait végétarien." - Paul McCartney

Odile Snout est dans sa cuisine avec ses deux jumeaux adolescents. Ils attendent Hervé, le chef de famille dont on fête ce soir-là l'anniversaire. Mais les heures passent et Hervé ne rentre pas.

Le lendemain Odile va déclarer la disparition de son mari à la gendarmerie, elle est reçue par un lieutenant qui ne considère pas cette disparition comme inquiétante. Hervé a pu disparaitre volontairement, il finira bien par rentrer.

Hervé dirige le dernier abattoir du département. Élevé par des parents qui vouaient leur existence au végétal, Hervé est devenu un grand amateur de viande, fasciné par la viande et ses origines, par les animaux d'élevage. C'est un homme de pouvoir qui n'inspire pas la sympathie, cruel autant envers les animaux qu'envers les hommes.

Dans une ville de province de taille moyenne où tout le monde se connaît, les Snout forment une famille qui s'est embourgeoisée, ils vivent dans une grande maison prétentieuse mais c'est une famille qui va mal. Les jumeaux sont dissemblables au possible et se méprisent, Tara se maintient à flot grâce à la course à pied, à son amitié avec Leila et à son projet de partir dès que possible, son frère Eddy est considéré par son père comme son digne successeur à la direction de l'abattoir, Hervé ne lui a-t-il pas dit un jour "Tu seras un tueur, mon fils." ?  Quant à Odile, elle tente de faire face comme elle peut à la dérive de sa vie et de son couple. 

Un roman noir sur la question animale qui met en scène un monde du travail extrêmement violent autant envers les hommes qu'envers les animaux. La violence envers les animaux est insoutenable et la violence physique et psychologique envers les hommes est permanente dans cet abattoir dirigé par un homme cynique et cruel. 

Certaines pages sur l'abattage des cochons, des bovins sont très dures, très réalistes mais elles sont nécessaires pour le propos du roman, l'auteur ne sombre à aucun moment dans la surenchère gratuite.

Les tueurs, les désosseurs tiennent grâce à l'alcool, aux médicaments et à la drogue, ils ont honte d'exercer ce métier et sont dans l'impossibilité de craquer en public sous peine de moqueries. Olivier Bordacarre nous décrit un monde fermé où "Tout le monde sait. Tout le monde tait", un monde où le travail effectué ne peut qu'engendrer des tensions et des violences. Comment ne pas devenir fou quand on tue des animaux à longueur de journée ? 

Un roman social noir tendu, addictif, une construction habile avec des bonds temporels qui nous mènent du jour de la disparition d'Hervé à l'après et à l'avant de ce fameux jour. Des pointes d'humour et d'ironie, des surenchères, l'imagination débordante de l'auteur apportent une touche de légèreté à cette satire très réussie sur un monde du travail très particulier et sur la vacuité de la famille quand plus rien ne réunit ses membres. Un roman noir très original.


L'auteur




Olivier Bordaçarre est écrivain, dramaturge et comédien. 



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