vendredi 15 janvier 2016

L'amie prodigieuse d'Elena Ferrante


 

Date de parution : octobre 2014 chez Gallimard
Nombre de pages : 400

Comme dans un film italien


Ce livre est non seulement une magnifique ode à l'amitié mais aussi un grand roman populaire et psychologique.
L'amie prodigieuse est le premier volet d'une série de 4 romans dans lesquels l'auteur va retracer 50 ans d'une amitié indéfectible mais non moins orageuse entre Lila et Elena.

Ce premier tome commence lorsque Rino, le fils de Lila, vient prévenir Elena la narratrice que sa mère de 70 ans a disparu sans laisser de traces, avant de partir elle a même découpé toutes les photos où elle apparaissait.
Elena se souvient alors de la naissance de leur amitié dans leur enfance et de leur adolescence dans les années 50 dans un quartier populaire de Naples. Un quartier où règne un climat de tension permanente, un quartier dont les enfants ne franchissent jamais les frontières, un quartier où tout le monde se connait et où persistent des haines anciennes entre certaines familles et des rivalités entre jeunes.

La prédisposition des jeunes pour les études n'est pas valorisée dans ce monde de commerçants et d'artisans humbles pour qui le seul avenir possible pour leurs enfants est de travailler dans la boutique de leurs parents ou, pour les filles, d’aider à l'entretien de la maison en attendant de se marier. C'est une vie quotidienne organisée autour de la famille et régie selon un mode patriarcal avec soumission au père voire aux frères.

Lila et Elena ont deux personnalités hors du commun et des caractères bien trempés mais opposés.
Lila est surdouée, elle a  appris à lire et à écrire seule, mais doit abandonner l'école à la fin du primaire pour intégrer l'atelier de cordonnerie familial. En revanche Elena, soutenue par son institutrice, poursuivra ses études et s'émancipera par l'école. Lila  et Elena sont à la fois complices, inséparables même, mais aussi parfois rivales. 

 " Je me rendis compte qu'elle semblait en avance 
sur moi dans tous les domaines, comme si elle allait dans une école secrète"

"En la voyant, on se disait qu'elle dégageait une lumière 
qui était une grande claque assénée à la misère de notre quartier"

Lila et  Elena, figures explosives et très attachantes sont entourées d'une imposante et magnifique galerie de portraits secondaires, il est d'ailleurs souvent nécessaire de se reporter à l'index des personnages pour s'y retrouver. 

Elena Ferrante décrit magnifiquement bien l'atmosphère de ce quartier à la violence diffuse, le texte fourmille de scènes de rues, de moments mettant en jeu les relations entre les gamins puis les préadolescents, montrant le rôle des grands frères, la place des filles dans cette société...

L'histoire se déroule sous nos yeux comme dans un film, on imagine même les mamas italiennes s'apostropher d'une fenêtre à l'autre, on entend les cris, les rires et les chants dans la cour, on voit les frères Solara frimer avec leur voiture la fameuse Millecento... 
L'écriture est très visuelle, l'auteur nous retranscrit à merveille l'univers de ce quartier populaire et la vie du petit peuple de Naples par une multitude de mises en scène qui rappellent les grands moments du cinéma italien. C'est grouillant de vie et résolument optimiste.

C'est une fresque très puissante, très bien menée, à l'analyse toujours très juste.
Je vais maintenant vite me précipiter sur la suite, "Le nouveau nom", qui vient de paraitre en France.
Merci à Eva pour cette  belle découverte, voici son avis


L'auteur

Probablement née à Naples, ville présente dans ses deux romans, Elena Ferrante (un pseudonyme) vivrait selon certains en Grèce. Selon d'autres, elle serait retournée s'installer à Turin.

L'auteur dont quasiment rien n'est connu avec certitude, refuse d'être un personnage public et ne s'est pas présentée à la remise des prix que son premier roman "L' Amour harcelant" avait obtenu en 1992.
Elle n'accorde aucune interview.

Elena Ferrante a également publié en 2003 un recueil de lettres à son éditeur, de textes et de réponses à ses lecteurs où elle parle d'elle-même, de son travail. Elle tente de faire comprendre ses raisons de demeurer dans l'ombre, parle d'un désir d'auto-préservation de sa vie privée, d'un souci quelque peu névrotique d'inaccessibilité, de son souci de maintenir  entre elle et son lectorat une certaine distance et de ne pas se prêter aux jeux des apparences où risquent de l'entraîner les contacts avec la presse. Elle est fermement  convaincue que ses livres n'ont pas besoin d'une 4ème de couverture reproduisant sa photographie et entend qu'ils soient perçus comme des organismes auto-suffisants auxquels la présence de l'auteur ne pourrait rien ajouter  de décisif.



dans la catégorie PONCTUATION, challenge organisé par Enna




6 commentaires:

  1. Encore une belle critique, il me le faut, ce roman! D'autant plus qu'il est sorti en poche.

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  2. Les avis sont vraiment unanimes en effet... Tu devrais te régaler. Quant à moi, j'enchaine très vite sur la suite...

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  3. Je ne peux m'empêcher de prendre un grand plaisir à lire que ce coup de coeur pour Le nouveau nom est partagé :-)

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    1. Coup de cœur pour l'amie prodigieuse et non pour le nouveau nom que je n'ai pas encore lu... mais je ne doute pas qu'il me plaise autant!!!

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  4. Comme je suis contente qu'il t'ait plu, ainsi que le Nouveau Nom! C'est un roman qui a été beaucoup lu sur la blogo grâce au bouche à oreille et je n'ai pour le moment pas vu un seul avis négatif ou même mitigé! :)

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    1. Un livre qui fait l'unanimité en effet. J'attends comme toi de lire un avis négatif ou mitigé mais est-ce possible? Peut-être Jérôme???

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