Date de parution : avril 2022 chez Flammarion
Nombre de pages : 208
Ariane, heureuse dans son mariage et mère comblée de trois enfants, rencontre Sandro, un barman. Très vite, elle devient obsédée par cet homme. " Il y a un an, je suis tombée amoureuse comme on tombe malade. Il m'a regardée, c'est tout. Son regard était la goupille d'une grenade, un compte à rebours vers la mort programmée de ma famille."
Voici un texte très personnel tant il est clair qu'Ariane et Agathe ne sont qu'une seule et même personne. Je suis toujours gênée par la façon dont certains auteurs nous livrent leur intimité avec ce que j'ai tendance à considérer comme de l'impudeur. Quoiqu'il en soit, je dois reconnaitre que même si cette histoire de passion qui balaye tout sur son passage a déjà été maintes fois écrite, Agathe Ruga nous décrit avec ferveur et sincérité l'obsession d'une femme pour un homme qui normalement n'avait rien pour attirer son regard. Un barman, mauvais garçon, plus jeune qu'elle de dix ans, un homme qui vit la nuit, un homme aux antipodes de ceux qu'elle côtoie dans son milieu littéraire, "J'aurai pu tomber amoureuse d'un philosophe, d'un éditeur, d'un politicien", un homme qui, par l'échange d'un regard, lui prouve que sa féminité n'est pas morte, qu'elle n'est pas que mère alors qu'elle vient de donner naissance à son troisième enfant. Elle traduit parfaitement le désarroi qui peut saisir une femme devenue mère "Je voudrais dormir... Je voudrais rêver et rire, je voudrais retrouver l'insouciance. Je voudrais m'en aller" et qui, emportée par son obsession pour un homme se retrouve dans l'incapacité de porter attention à sa famille ni de porter le moindre intérêt à sa passion, la littérature.
Ce récit est le cri de liberté d'une femme qui ne peut pas résumer sa vie à un simple bonheur conjugal auprès d'un mari riche et beau et de leurs trois enfants. Elle reproduit le schéma de sa mère qui a toujours mis sa liberté au-dessus de tout "Enceinte de moi, maman avait déjà un amant... Son bonheur perfusait mon sac amniotique. J'ai connu le goût de l'amour interdit avant celui du lait... C'est le schéma que j'ai appris : celui avec lequel je suis le plus à l'aise : une mère, sa fille, un beau-père". J'ai trouvé intéressante l'analyse qu'elle fait du lien entre son attirance pour Sandro et la recherche des hommes de sa vie, son papy, son père, les différents compagnons de sa mère en particulier Lolo dont le départ sans lui dire au revoir reste une blessure à vif.
Sincère, écrit d'une belle plume, ce deuxième roman d'Agathe Ruga est une réussite. J'espère simplement que son prochain portera sur un sujet moins intime et qu'elle se laissera portée par son imagination.
Citations
" Coupez le rire d'une femme dans une maison et c'est toute la maison qui pleure."
" Une fois que je les avais rendus pères, je ne pensais plus qu'à fuir pour renaître, ailleurs."
" Je voulais une pause dans ma vie de mère, moi aussi je voulais être une enfant, je voulais qu'on s'occupe de moi."
L'auteure
Photo : Pascal Ito - Flammarion
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