Date de parution : mars 2021 chez Grasset
Nombre de pages : 224
PREMIER ROMAN
L’hyène est un animal dont le cri est un rire qui laisse
imaginer sa cruauté. Les plus retorses sont les femelles qui dominent
les mâles, les matent, les dévorent. Elles ne s'accouplent que pour se
reproduire, terrorisent ceux qui les défient et enseignent
méticuleusement à leur descendance à faire de même.
Blanche a surnommé les femmes issues de sa lignée maternelle "la dynastie des hyènes". Il s'agit de sa mère Colette, sa grand-mère Georgette et son arrière-grand-mère Louise-Huguette. Blanche les appelle "la vieille", "la très vieille" et "la très très vieille", ces femmes se détestent entre elles, détestent les hommes et transmettent cette haine et leur soif de vengeance à leurs filles. La haine est leur moteur et "le goût de la chasse, un exutoire nécessaire".
A 44 ans, Blanche est face à une décision importante, va-t-elle avorter pour rompre cette chaine de haine, pour ne pas reproduire le schéma familial ? "Pardon, mon enfant, je ne suis pas sûre que j'aurais pu faire de toi autre chose qu'une hyène, pardon, ma toute petite... Elle songe aux héritages invisibles qui ne laissent aucune trace dans les souvenirs, ces legs que l'on transmet sans le vouloir, dons vénéneux qui coulent avec le sang."
Toute petite déjà Blanche s'intéressait à l'histoire familiale, explorant l'antre de ses aïeules, à la recherche de révélations, hantée par les mots de sa grand-mère, la vieille Georgette, traumatisée par la violence de cette femme qui l'a à moitié élevée, lisant des lettres qu'elle n'aurait pas dû lire, écoutant des conversations qu'elle n'aurait pas dû entendre... Depuis longtemps elle a entrevu un secret...
Le temps d'un déjeuner avec sa mère, elle déroule ses souvenirs et convoque à
la table ses ancêtres, Clara, Louise-Huguette, Georgette, pour comprendre pourquoi les femmes de sa lignée haïssent tant les hommes avant de décider si elle garde ou non l'enfant qu'elle porte.
A travers l'histoire d'une famille sur cinq générations, l’auteure nous offre une approche originale de la question de la transmission inter générationnelle. Selon l'analyse transgénérationnelle les traumatismes et non-dits vécus par les ancêtres d'un individu se répercutent sur lui. Le legs familial ne se résume pas à l’ADN. Blanche va remonter son histoire familiale jusqu'au traumatisme originel subi par Clara, née vers 1886, son arrière-arrière grand-mère.
La famille vit depuis plusieurs générations dans un petit village picard, Annie Ferret restitue parfaitement le parler des villageoises, l'atmosphère faite de croyances populaires, de rumeurs, de légendes, d'histoires de sorcellerie et d'envoûtement du début du 20ème siècle à l'époque où Clara vivait dans le village. Une époque où des femmes pouvaient être qualifiées de sorcières entrainant la malédiction sur toute leur famille.
Racisme, violences sexuelles, humiliations, combat pour la possession de la terre, cupidité ont fait naître chez les ancêtres de Blanche une colère et une haine qui traversent les générations. En reconstituant le puzzle de sa famille Blanche comprend l'héritage qui pèse sur ses épaules mais, contrairement à ses ancêtres soumises au pouvoir masculin sur leur corps, elle est une femme libre et dispose de la liberté d'enfanter ou non.
Avec une construction narrative habile et une écriture vive, Annie Ferret sait parfaitement entretenir le suspense rendant la lecture de ce roman complètement addictive. Une belle réussite.
L'auteure
Modèle d'art et écrivain, Annie Ferret pose pour des peintres et sculpteurs, vit et écrit à Paris.
Tiens, je note.
RépondreSupprimerOn en entend très peu parler et c'est dommage...
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