lundi 11 juillet 2016

86, année blanche de Lucile Bordes



Date de parution : mars 2016 chez Liana Levi
Nombre de pages :133

En cette année anniversaire des 30 ans de la catastrophe de Tchernobyl, j'ai eu envie de lire un récit sur ce drame. La parution de 86, année blanche, sélectionné pour le prix orange du livre, est tombé à point.

Lucile Bordes nous parle de trois femmes pendant les 15 jours qui suivent l'explosion, une française et deux ukrainiennes. Chacune essaye de comprendre la catastrophe

Lucile Bordes a choisi de parler du silence autour de cet évènement.

Lucie, une jeune fille de 15 ans, vit dans le sud de la France. Quand elle entend parler à la télévision de ce qui est d'abord nommé accident grave avant d'être appelé catastrophe, elle a la sensation de vivre la fin du monde, elle guette le nuage, pensant être frappée d'une mort foudroyante, essaye de rassurer son petit frère en l'aidant à construire un abri anti-atomique en légo. A cette période, le père de Lucie, employé sur les chantiers navals et délégué syndical très engagé, vit une période  très difficile avec la fermeture des chantiers navals qui devient inévitable.
Lucile Bordes avait 15 ans en 1986 et vivait dans le sud de la France, elle a certainement mis beaucoup d'elle-même dans le personnage de Lucie.

Ludmila, vit à Prypiat, une ville nouvelle qui jouxte la centrale. Son mari est ingénieur sur le site.
Au lendemain de l'accident, inconscients du danger, ils admirent avec des amis l'aurore boréale provoquée par l'incendie au dessus de la centrale mais son mari est appelé le lendemain, il devient un liquidateur.
Ludmila est évacuée, elle part à Moscou avec sa fille chez ses parents emportant des affaires pour 2 jours. Peu à peu elle va comprendre qu'elle ne reviendra jamais chez elle. Elle va retrouver son mari à l'hôpital de Moscou atteint du mal des rayons qui ne lui laisse que 14 jours à vivre.

Oulia vit à Kiev, à 130 kms du drame. Elle hésite à partir ou rester alors que les autorités affirment qu'il n'y a pas de danger mais demandent aux parents d'éloigner leurs enfants et que les trains sont chaque jour un peu plus bondés...
Pendant ce temps, la vie continue à Kiev avec la célébration du 1er mai et une course cycliste internationale pour la paix ... C'est surréaliste.

Le silence traverse tous les chapitres : le silence des médias français, celui des médias russes, celui des gens évacués, celui qui règne dans les rues de Kiev vidées par un couvre-feu implicite, celui dans lequel s'enferme le père de Lucie, celui qui règne sur les chantiers navals et dans la maison de Lucie pendant que son père déprimé dort toute la journée.

Je n'ai pas vu l'intérêt de l'histoire d'Oulia pour qui cette période correspond à la fin de son couple, son histoire n'apporte rien à l'ensemble du récit selon moi.

J'ai aimé l'angle du silence choisi par l'auteur pour relater la fin de la vie d'avant de ces trois femmes dans ce court roman où leurs histoires alternent.
Lucile Bordes a su mettre en écho la fin d'une utopie pour les ukrainiens, fiers de leur pays, et la fin de l'utopie du  père de Lucie, un syndicaliste engagé qui se sent liquidé.
Un livre qui ne manque pas d'intérêt mais qui est loin d'atteindre la force de La supplication, chroniques du monde après l'apocalypse de Svetlana Alexievitch, un livre construit sur les témoignages des victimes de Tchernobyl. 


Citations
"C'était ça le plus dur, le temps qu'on nous volait en ne disant rien."

"Plus de passé. Pas d'avenir. Un présent démesuré."

"Pas d'images. Pas de reportages. Pas dé témoignages. La vie continuait normalement à Kiev. Dans la bouche du présentateur, c'était un ordre. La vie continuait officiellement à Kiev"


L'auteur

Née en 1971, Lucile Bordes enseigne à l'université de Toulon et vit à La Seyne-sur-Mer. Elle anime également des ateliers d’écriture.

86, année blanche est son troisième roman




44ème contribution au Challenge Rentrée Hiver 2016 organisé par Laure de MicMelo

Catégorie PONCTUATION

6 commentaires:

  1. Je suis d'accord avec toi pour dire que ce roman n'est pas inintéressant, mais manque de force, qu'il reste un peu trop à la surface des choses.
    Je crois que j'ai globalement un problème avec les formats courts, qui me laissent souvent sur ma faim... ce qui ne devrait pas être le cas d'Alexievitch ;-)

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    1. On partage le même avis, tu devrais vraiment trouver ton compte avec la supplication, je l'ai trouvé vraiment riche...

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  2. Je suis très tentée par le sujet mais un peu refroidie quant au manque de force parfois que tu sembles souligner. Toutefois, la curiosité me pousse à envisager cette lecture...A voir!

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    1. c'est juste une approche assez courte de la catastrophe qui m'aurait certainement plus enthousiasmée si je n'avais pas lu la supplication avant.

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  3. Le sujet m'intéresse. Je me rappelle très bien ce défilé du 1er mai après la catastrophe avec un saut au dispensaire où ma mère travaillait pour ingurgiter une dose d'iode, trop tard sûrement... Je vais voir s'il est dans ma bibliothèque.

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