Date de parution : février 2023 chez Gallimard
Nombre de pages : 352
Traduction de l'allemand Bernard Lortholary
A la mort de son épouse Birgit, Kaspar, libraire à Berlin, découvre un pan de sa vie qu'il avait toujours ignoré : avant de quitter la RDA pour passer à l'Ouest en 1965 et rejoindre Kaspar, Birgit avait abandonné un bébé à la naissance. C'est au travers des écrits de sa femme qu'il découvre ce pan caché de son histoire. Sa femme voulait écrire sa vie et retrouver sa fille.
Kaspar va partir à la recherche de cette belle-fille inconnue. Quand il retrouve Svenja en Allemagne de l'Est, il découvre qu'elle a épousé un néo-nazi avec qui elle a une fille, Sigrun, qu'ils ont élevée dans l'idéologie nazie. Sigrun est âgée de quatorze ans quand Kaspar la rencontre pour la première fois, elle vit avec ses parents dans une communauté nationaliste néonazie.
Kaspar serait prêt à voir en elles les membres d'une nouvelle famille mais leurs différences idéologiques font obstacle. Comment comprendre qu'une adolescente par ailleurs intelligente, puisse soutenir des théories complotistes et racistes ? Comment l'amour peut-il naître dans ce climat de méfiance et de haine ?
Kaspar, homme modéré et infiniment bon, fils de pasteurs, prend comme un héritage la recherche que voulait faire sa femme sans jamais être parvenue à concrétiser son désir, il part sur les traces de sa petite-fille mais aussi sur les traces de la vie cachée de sa femme. Son amour pour sa femme est très beau, il la décrit comme morte de son impatience, d'alcool et de somnifères et ne la juge aucunement quand il découvre après sa mort les secrets qu'elle lui avait cachés. C'est un homme d'une humanité et d'une tolérance remarquables. Quand il découvre que Sigrun qu'il est prêt à considérer comme sa petite-fille a été élevée dans la doctrine nazie, Kaspar tente de l'ouvrir à un autre monde et à d'autres expériences que celles que lui offrent ses parents. Il essaye d'élargir et d'ouvrir l'horizon intellectuel de Sigrun avec subtilité par les discussions mais aussi par la culture, littérature et musique.
Un roman d'une rare puissance qui mêle une intrigue romanesque très réussie tant au niveau de l'histoire que des personnages très bien incarnés et une dimension historique très forte. Immersion dans la RDA avant la réunification, nostalgie de la RDA, pays qui n'existe plus, nostalgie de la grande Allemagne. Le personnage du grand-père est de ceux qui ne s'oublie pas, la délicatesse avec laquelle il s'offre à sa petite-fille sans s'imposer, son questionnement pour parvenir à l'atteindre sans jamais lui imposer aucun discours sont remarquablement décrits. Certaines scènes du roman sont marquantes, celle où il prépare la chambre de Sigrun où il va l'accueillir pour son premier séjour chez lui, celle de leur visite du camp de Ravensbrück, les scènes où ils se rapprochent par de petits gestes, un baiser sur la joue, un baiser en se serrant dans les bras.
Bernhard Schlink parvient à nous exposer avec précision les points de vue diamétralement opposés de Kaspar et de Sigrun et brosse ainsi un tableau très inquiétant d'une certaine jeunesse allemande adepte des pires théories du complot qui éclaire la montée de l'idéologie nazie dans l'Allemagne contemporaine.
L'auteur
Bernhard Schlink est un écrivain allemand. En 1995, il publie "Le liseur", un roman partiellement autobiographique qui devient un best-seller traduit dans 37 langues.
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