Date de parution : janvier 2016 aux Editions Philippe Rey
Nombre de pages : 192
Vivre à Port-au-Prince
Nous sommes à Port-au-Prince, ville qualifiée de "cri de douleur", dans le quartier Carrefour, le plus pauvre de la ville "Carrefour dans Port-au-Prince, c'est Haïti dans le monde".
Là vit ou plutôt survit une famille avec ses 5 enfants. Le père est maçon à la petite semaine sur les chantiers, la mère est "brasseuse c'est à dire marchande ambulante de serviettes, parfois lessiveuse, parfois repasseuse", ils mènent une vie misérable et ont du mal à nourrir leurs enfants.
C'est un couple uni qui s'aime, rêve de se marier et fonde beaucoup d'espoir sur l'avenir de leur fille aînée Babette, belle et intelligente. Ils aimeraient bien lui trouver un bon parti.
L'auteur parvient dès les premières pages à nous plonger dans l'atmosphère grouillante de Port-au-Prince, on visualise d'emblée cette foule aux tenues bigarrées, ces "arcs en ciel", cette ville où "c'est chaque jour le carnaval", on entend les conversations dans les camionnettes où tout le monde s'entasse... Ils sont des milliers de personnes à brasser la ville (d'où le titre du roman) à s'agiter pour survivre dans une extrême misère, où souvent la seule solution de survie est la prostitution "tout le peuple se putanise". "Parfois, si je ne me donnais pas au voisin, la chaudière ne monterait pas le feu".
L'auteur parvient dès les premières pages à nous plonger dans l'atmosphère grouillante de Port-au-Prince, on visualise d'emblée cette foule aux tenues bigarrées, ces "arcs en ciel", cette ville où "c'est chaque jour le carnaval", on entend les conversations dans les camionnettes où tout le monde s'entasse... Ils sont des milliers de personnes à brasser la ville (d'où le titre du roman) à s'agiter pour survivre dans une extrême misère, où souvent la seule solution de survie est la prostitution "tout le peuple se putanise". "Parfois, si je ne me donnais pas au voisin, la chaudière ne monterait pas le feu".
Un jour Erickson, un homme marié bien plus âgé que Babette l'aborde, la prend comme maîtresse et entretient toute la famille. Babette devient blonde et est surnommée la Barbie d'Erickson dans le nouveau quartier où la famille vit désormais loin de leur bidonville.
Cette nouvelle vie va bouleverser l'équilibre familial, les parents sont partagés entre la culpabilité, la honte, le remords et la colère.
Cette nouvelle vie va bouleverser l'équilibre familial, les parents sont partagés entre la culpabilité, la honte, le remords et la colère.
"Je me hais de vivre dans un pays où la naissance d'un enfant
est un crime contre ses frères et sœurs.
Je déteste ce monde où les familles sont obligées
de vendre leurs filles pour entretenir leur famille."
Ce sera l'éclatement de la famille lorsque le fils ainé qui adore sa sœur va quitter la maison. "Nos enfants ne nous pardonneront pas d'avoir donné leur sœur en pâture à un inconnu".
On pressent le drame qui va survenir, on sent que le noir va recouvrir le carnaval et les images bariolées...
Ce roman est une grande fresque sociale de Haïti, l'auteur y parsème aussi des critiques sur la communauté internationale, les ONG, le traitement de l'information et évoque la corruption de l'état.
Les brasseurs de la ville est un premier roman très réussi qui "brasse" le lecteur.
J'ai aimé le style de narration choisi, l'auteur mêle les voix du père et de la mère sans prévenir le lecteur comme s'ils ne faisaient qu'un. J'ai aimé l'écriture très visuelle qui touche tous les sens avec des couleurs, des odeurs, des bruits à chaque page, même si je m'attendais à une écriture encore plus imagée. Un livre fort, une plongée dans la vie et les tourments du peuple haïtien bien réussie.
J'ai aimé le style de narration choisi, l'auteur mêle les voix du père et de la mère sans prévenir le lecteur comme s'ils ne faisaient qu'un. J'ai aimé l'écriture très visuelle qui touche tous les sens avec des couleurs, des odeurs, des bruits à chaque page, même si je m'attendais à une écriture encore plus imagée. Un livre fort, une plongée dans la vie et les tourments du peuple haïtien bien réussie.
Citations
"Le travail, il faut le prendre et non le chercher"
"Tout ici est une question de couleur. Dis-moi quelle couleur tu portes, je te dirai qui tu es. …. Ma mère portait joyeusement une chemise trop large à grosses fleurs rouges sur une jupe longue à petites fleurs jaunes ou un pantalon vert. C'était le seul moyen de colorer sa vie. Depuis, nous sommes arcs-en ciel."
"L'espace, voilà le vrai luxe"
L'auteur
Evains Wêche est né en 1980 à Haïti. Dentiste, il est aussi bibliothécaire et animateur culturel, il organise des ateliers de lecture. Il a publié un recueil de nouvelles en 2013, Les brasseurs de la ville est son premier roman.
28eme contribution au Challenge Rentrée Hiver 2016 organisé par Laure de MicMelo
5ème lecture parmi les vingt premiers romans sélectionnés en phase 1 des 68 premières fois
Je n'avais pas encore entendu parler de ce livre, mais ta chronique me donne envie de découvrir ce roman.Merci à toi.Bonne soirée.
RépondreSupprimerC'est tout l'intérêt de l'opération des 68 premières fois, faire connaître des premiers romans très peu voire pas du tout médiatisés. Bonne lecture !
SupprimerAprès le billet de Nicole, tu enfonces le clou !
RépondreSupprimerIl vaut le coup !
SupprimerJe l'a lu et aimé également : http://claraetlesmots.blogspot.fr/2016/02/evains-weche-les-brasseurs-de-la-ville.html
RépondreSupprimerAvis partagé en effet. Beau billet.
SupprimerTrès jolie chronique, qui se rapproche beaucoup de ma lecture et met bien en valeur le talent de «coloriste» d'Evains Wêche. http://urlz.fr/3rDI
RépondreSupprimerUne belle lecture en effet, je retiens le terme de "coloriste" très approprié à cet auteur.
SupprimerIl fait partie des découvertes intéressantes de ces 68 premières fois et grâce à nous, on va en parler !
RépondreSupprimerTu as parfaitement raison, il fait partie de mon tiercé gagnant pour l'instant mais je n'ai lu que 5 livres !
SupprimerUne belle critique et une belle découverte. Je le note celui-ci.
SupprimerDe belles sélections pour ces 68...
Une belle découverte grâce aux 68... J'espère que les 68 vont contribuer à le faire connaître.
Supprimer