Date de parution : 24 aout 2023 aux éditions Le Passage
Nombre de pages : 240
" Sa sœur Zelda, depuis toujours, est un horizon dans lequel se jeter."
A l'est de l'Europe, quelque part dans la Zone de Résidence où sont cantonnés les juifs en ce début du vingtième siècle.
Henni a huit ans et vit dans un village ordinaire avec sa famille, ses parents, son frère aîné, les bébés et surtout Zelda, sa sœur aînée, son modèle en tout. Henni et Zelda s'occupent des bébés. Un soir, à la fin de l'hiver, des hommes en furie pénètrent dans leur maison, comme dans tant de maisons ils sont entrés et entreront encore pour piller, pour punir et pour tuer. Dans l'affolement, une partie de la fratrie parvient à s'enfuir.
Le livre raconte vingt-quatre heures de la vie d'Henni après cette intrusion.
Ce roman m'a au départ surprise tellement il est différent des romans d'Angélique Villeneuve que j'ai déjà lus, j'ai eu quelques petites difficultés à rentrer dedans mais ce ne fut que l'histoire de quelques dizaines de pages.
L'auteure réussit merveilleusement bien à se mettre dans la peau de cette petite fille de huit ans lors de son périple dans des lieux où elle n'est jamais allée, dans des lieux saccagés par la folie humaine. A travers ses pensées, ses souvenirs, le monde qu'elle recompose en pensée, nous découvrons une personnalité inoubliable, sa force, son ingénuité bouleversent. Elle avance portée par les conseils de son père, par la voix de Zelda quand elle se retrouve seule. Sa famille est avec elle grâce à ses "doigts-personnages" car elle a attribué chacun de ses doigts à un membre de sa famille " Elle n'est pas seule. Il suffit de dire le nom de chacun dans sa tête."... Quelle magnifique idée !
L'écriture d'Angélique Villeneuve est comme toujours très poétique, très visuelle, elle fait appel à tous les sens, d'emblée l'atmosphère est là avec arbres et animaux, d'emblée les personnages sont fortement incarnés. Nous découvrons le quotidien tranquille et rempli d'apprentissages d'Henni avant le jour funeste, la place de Zela et de son père dans sa vie, son regard sur sa mère immobile dans son fauteuil, son amour pour son petit frère Avrom qui lui a été désigné comme "son bébé tout à elle", le plus beau cadeau qui pouvait être fait à cette petite fille qui rêvait de posséder quelque chose de vivant.
Un texte où sauvagerie et tendresse se côtoient, une sauvagerie qui n'est que suggérée et c'est une des grandes forces de ce roman où Angélique Villeneuve a choisi de se centrer sur la petite fille.
Un texte d'une rare puissance qui a une portée universelle car si nous devinons très vite qu'il s'agit de juifs, le mot n'est jamais précisé, cette histoire de persécution peut se passer n'importe où, n'importe quand et atteindre n'importe quelle communauté. La résonnance avec l'actualité est très forte.
Un texte bouleversant qui offre une lueur d'espoir à la fin avec un dénouement ouvert qui laisse toute sa place au lecteur. Une lecture qui révolte mais qui éblouit par la grâce de l'écriture de l'auteure et par la force de son héroïne.
Pour Antigone ce roman est un petit caillou supplémentaire dans un parcours d'une rare sensibilité.
L'auteure
Angélique Villeneuve, romancière, est l'auteure de "La belle lumière", 2020, "Maria", 2018, Grand Prix SGDL, "Nuit de septembre", 2016 et "Fleurs d'hiver", 2014. (Source : éditeur)
Lus de cette auteure
pour accéder à ma chronique, cliquer ici
pour accéder à ma chronique, cliquer ici
pour accéder à ma chronique, cliquer ici
Je n'ai pas été comme toi surprise par l'écriture des premières pages mais heureuse au contraire de plonger directement dans cette écriture de l'intime très particulière. Un très beau roman.
RépondreSupprimer