Date de parution : 24 aout 2023 chez Sonatine
Nombre de pages : 528
Traduction de l'anglais (Etats-Unis) : Julie Sibony
Etats-Unis d'Amérique dans un futur pas si lointain.
Bird Gardner, 12 ans, vit seul avec son père sur un campus universitaire. Depuis quelques années, leur existence est rythmée par des décrets liberticides. Le gouvernement a en effet instauré le PACT, une loi de préservation des traditions, permettant de considérer tout élément de culture étrangère comme suspect et potentiellement dangereux pour la société. Ces lois ont été promulguées pour préserver la culture américaine après les années d'instabilité économique et de violence de la Crise. Pour maintenir la paix et la sécurité, les autorités sont désormais autorisées à déplacer les enfants de dissidents, en particulier ceux d'origine asiatique, dans des familles d'accueil sélectionnées par le gouvernement. Les bibliothèques ont été contraintes de retirer des livres considérés comme antipatriotiques, y compris le recueil de poèmes "Nos cœurs disparus" de la mère de Bird, Margaret, une poétesse sino-américaine disparue mystérieusement trois ans plus tôt.
Bird a grandi en reniant sa mère et ses poèmes, il ne connait pas son travail, il ne sait pas ce qui lui est arrivé et il sait qu'il ne doit pas se poser la question. Il a appris à faire profil bas, à ne jamais attirer l'attention sur lui.
Mais le jour où une lettre arrive, ne contenant qu'un mystérieux dessin, il comprend que c'est sa mère qui lui laisse un indice pour la retrouver. Guidé par un réseau clandestin de bibliothécaires, Bird part alors à la recherche de Margaret.
Cette dystopie est d'autant plus effrayante qu'elle nous apparait très réaliste et pas très éloignée de nous. L'engrenage crise, chaos, stigmatisation des personnes d'origine asiatique considérées comme responsables de la Crise, promulgation du PACT jugé au départ modéré et raisonnable et donc perçu comme un progrès, surveillance des citoyens, interdiction des manifestations, destruction des livres, retrait des enfants à leurs parents sous le prétexte qu'ils puissent être contaminés par leurs idées jugées subversives, émeutes anti-PACT... un engrenage glaçant qui décrit un monde effrayant mais on sait que censure de livres, stigmatisation d'une partie de la population... sont monnaie courante dans certains pays, c'est donc un monde qui n'est pas si irréaliste qu'on aimerait le croire.
Cette dystopie sert de cadre à une très belle histoire familiale, les liens entre la mère et son fils sont observés à la loupe par l'auteure. Des questions essentielles sont posées : comment transmettre son histoire à son enfant, faut-il le protéger quoiqu'il en coûte ? Comment les membres d'une société civilisée peuvent-ils fermer les yeux sur les oppressions dont sont victimes certains de leurs concitoyens ?
Par le biais d'un émouvant réseau de bibliothécaires et par l'action montée par Margaret à la fin du roman, Céleste Ng met brillamment en lumière le pouvoir des mots, le pouvoir des histoires et des passeurs d'histoires. Eloge de la protestation non violente, des protestations artistiques, ce roman délivre finalement un message d'espoir par le biais de l'ultime action menée par Margaret qui pourrait marquer le début d'un changement en portant la voix des opprimés. Ecrit d'une plume très fluide, sans aucune longueur, ce roman engagé est extrêmement fort et brillant. Les notes de l'auteure en fin d'ouvrage sont très intéressantes, elle y explique de façon détaillée ses sources d'inspiration et les recherches qu'elle a effectuées pour écrire ce roman.
Impossible à lâcher et bouleversant, ce roman trotte longtemps dans la tête une fois la lecture terminée. Un des GRANDS romans de cette rentrée littéraire !
L'avis plus mitigé de Delphine
Citations
" Elle lui remplissait la tête de fantaisie, de mystère et de magie pour y tailler une place à l'émerveillement."
" On ne brûle pas nos livres. On les pilonne. Beaucoup plus civilisé, n'est-ce pas ? On en fait de la pulpe et on les recycle en papier toilette. Ca fait longtemps que ces livres ont servi à essuyer les fesses de quelqu'un."
L'auteure
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