Date de parution : août 2015 chez Grasset
Nombre de pages : 320
Prix du style 2015
Première lecture de cette rentrée littéraire et premier gros coup de coeur!!!
Je
craignais que ce ne soit encore une banale histoire de relations
père-fils mais racontée par Sorj Chalandon cela ne pouvait être qu'intéressant et franchement je n'ai pas été déçue.
L'auteur
s'inspire de son histoire personnelle qu'il met en scène avec le petit
Émile Choulans, du nom de la célèbre rue de Lyon "la montée de Choulans" près de laquelle il a
grandi, au pied de la colline de Fourvière. Nous sommes dans les
années 60 et Émile a 13 ans.
On
situe très vite le personnage de son père : c'est un homme fantasque,
affabulateur, tyrannique, pervers mais aussi violent, bref un vrai
malade...
Sa mère est nettement plus insaisissable : passive, effacée, soumise, humiliée, aveugle
ou complice, on ne sait trop... Elle a un rôle bien ambigu... Elle se borne à lui répéter "Tu connais ton père, alors ne t'inquiète pas". Elle ne protège pas son enfant.
Émile/Sorj Chalandon n'a jamais connu la profession de son père et s'est toujours trouvé en
difficulté à la rentrée scolaire pour remplir la fiche de
renseignements, son père s'est mis en scène tour à tour comme chanteur aux
Compagnons de la chanson, footballeur professionnel, professeur de judo, parachutiste, conseiller personnel de Charles de
Gaulle...
Sa vie bascule quand il note "agent secret" dans profession du père sur cette fiche, il se dit alors que c'est un héros.
Il qualifie sa famille de sorte de secte repliée sur elle-même, famille qui ne recevait jamais personne, pas même ses grands parents. C'est une secte dont on ne s'échappe pas.
Il qualifie sa famille de sorte de secte repliée sur elle-même, famille qui ne recevait jamais personne, pas même ses grands parents. C'est une secte dont on ne s'échappe pas.
Dans son délire, son père persuade le jeune Émile que l’OAS, qui milite pour que l’Algérie
demeure française, a besoin de son aide pour tuer le général de Gaulle...
On
ressent son besoin d'amour, son admiration pour
celui qu'il voit comme un héros, le besoin qu'il a que son père soit
fier de lui. C'est l'histoire d'un enfant qui fera tout pour plaire à son père
Mais son père
n'est pas seulement affabulateur, il peut aussi se montrer très
violent en l'enfermant dans une armoire (la "maison de correction"), en
le condamnant à rester des heures à marcher dans sa chambre en guise de
punition, en le réveillant en pleine nuit, lui ordonnant d'un sec "debout
rebelle" de faire des exercices physiques. Certaines scènes de
violence sont vraiment insoutenables, son père poussant le sadisme
jusqu'à lui faire acheter lui-même un martinet avec son argent de poche.
La dernière partie, lorsqu'Émile/Sorj est devenu adulte et reçoit des lettres et coups de téléphone délirants de son père est très très émouvante.
La force de ce roman est Que Sorj Chalandon ne nous fait pas le récit de son enfance avec son regard et ses mots d'adulte mais au travers d'un enfant, son double Émile avec le ressenti de son âge.
C'est un récit très intime et bouleversant écrit d'une plume forte, puissante et détaillée. Il a certainement fallu beaucoup de courage à Sorj Chalandon pour mener à son terme cette confrontation avec son père dans cette biographie romancée et pour se livrer ainsi sans jamais tomber dans le pathos, la haine ou la rancœur. Il réussit même le tour de force de nous faire passer de l'effroi au rire.
Ce qui est frappant c'est qu'on ressent fortement tout au long du livre l'amour qu'il porte malgré tout à son père.
Ce n'est pas un livre sur l'enfance battue, il essaye plutôt de nous faire partager sa stupéfaction face à ce père fantasque qui peut aussi être merveilleux.
Quelle force de caractère doit-il avoir pour être parvenu à trouver son équilibre, seul, sans aucune aide, après une enfance pareille! Quel bel exemple de résilience...Le dessin et la fréquentation de la bibliothèque avec l'ouverture sur le monde qu'elle offre, ont contribué à le sauver.
C'est un livre, qu'une fois commencé, on ne peut plus lâcher.
A lire de toute urgence.
Citations
"Profession du père ? Ma mère n'avait pas osé remplir le formulaire. Mon père avait grondé.
- Écris la vérité : "Agent secret"." Ce sera dit. Et je les emmerde."
"J'ai raconté l'angoisse d'un enfant. J'ai raconté l'armoire, la maison de correction. J'ai raconté le pistolet, le béret, Biglioni. J'ai raconté ma mère en épouvante et son fils en effroi."
1ère contribution au Challenge 1% Rentrée Littéraire 2015
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Pour accéder à ma critique de ce livre, cliquer ici.
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C'est un récit très intime et bouleversant écrit d'une plume forte, puissante et détaillée. Il a certainement fallu beaucoup de courage à Sorj Chalandon pour mener à son terme cette confrontation avec son père dans cette biographie romancée et pour se livrer ainsi sans jamais tomber dans le pathos, la haine ou la rancœur. Il réussit même le tour de force de nous faire passer de l'effroi au rire.
Ce qui est frappant c'est qu'on ressent fortement tout au long du livre l'amour qu'il porte malgré tout à son père.
Ce n'est pas un livre sur l'enfance battue, il essaye plutôt de nous faire partager sa stupéfaction face à ce père fantasque qui peut aussi être merveilleux.
Quelle force de caractère doit-il avoir pour être parvenu à trouver son équilibre, seul, sans aucune aide, après une enfance pareille! Quel bel exemple de résilience...Le dessin et la fréquentation de la bibliothèque avec l'ouverture sur le monde qu'elle offre, ont contribué à le sauver.
C'est un livre, qu'une fois commencé, on ne peut plus lâcher.
A lire de toute urgence.
Citations
"Profession du père ? Ma mère n'avait pas osé remplir le formulaire. Mon père avait grondé.
- Écris la vérité : "Agent secret"." Ce sera dit. Et je les emmerde."
"J'ai raconté l'angoisse d'un enfant. J'ai raconté l'armoire, la maison de correction. J'ai raconté le pistolet, le béret, Biglioni. J'ai raconté ma mère en épouvante et son fils en effroi."
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J'ai lu tous les livres de Sorj Chalandon. C'est mon écrivain homme grand favori.
RépondreSupprimerMoi aussi!!! Je suis très déçue que ce livre n'ait été retenu pour aucun prix littéraire cette année, une grande injustice...
RépondreSupprimerTu as raison, Joëlle, d'insister sur le ton de ce livre, qui en fait toute la valeur. Il est étonnant de constater que le narrateur ne semble pas en vouloir à ce père violent, mais qui lui a aussi apporté une part de romanesque.
RépondreSupprimerUn très bel exemple de résilience en effet. Un livre qui paradoxalement n'est pas triste.
SupprimerC'est un très beau billet Joëlle, qui donne vraiment envie de lire le livre, alors qu'à la base j'avais de sérieuses réserves sur le postulat de départ, je craignais cette descente dans son intimité familiale, mais tu sembles avoir davantage retenu la grande émotion qu'il s'en dégage.
RépondreSupprimerMerci beaucoup de ta participation.
Si ce billet a permis de vaincre tes réticences, j'en suis ravie!!!
SupprimerBonne lecture...