Date de parution : 16 août 2018 aux éditions du Seuil
Nombre de pages : 304
" Les usines n'engraissent que ceux qui les possèdent. "
Aline, la quarantaine, est chef d'équipe dans une fabrique de textile dans le nord de l'Oise, son mari Christophe occupe le même poste dans une usine de fabrication de bouteilles. Ils forment un couple uni et vivent un bonheur parfait avec leurs deux enfants, le jeune Mathis à la santé fragile et Léa qui rêve de changer le monde et de voyager pour aider les autres.
Mais la crise économique sévit dans la région et la vie du couple bascule lorsque les deux usines qui les emploient délocalisent leur activité. Les machines qu'Aline supervise sont déménagées de nuit et la jeune femme est informée de son licenciement par texto. Quant à Christophe, face aux menaces qui pèsent sur son usine, il se met en grève et occupe son usine avec ses camarades.
Pour les épargner et ne pas perdre leur estime, Aline et Christophe cachent la vérité à leurs enfants et font semblant de vivre comme avant. Il leur faut protéger leur fille Léa, 17 ans, qui prépare son bac, un examen qui est pour eux synonyme d'ascenseur social. Léa est en section "économique et social" et étudie le fameux Paradoxe d'Anderson selon lequel l'acquisition d'un diplôme supérieur à celui de son père n'assure pas, nécessairement, à un étudiant une position sociale plus élevée. "Plus rien n’est acquis. Plus rien ne protège. Pas même les diplômes". C'est l'occasion pour Aline qui aide sa fille à réviser de réfléchir aux différents modèles économiques avec en mémoire les mots de son grand-père communiste, surnommé Staline, un homme aux fortes convictions.
Cette histoire de déclassement social, tristement d'actualité, est poignante et serre le cœur jusqu'au dénouement final. J'ai rarement vu des personnages aussi forts et aussi attachants que ceux que Pascal Manoukian met en scène dans ses romans. Il signe ici un roman engagé dans lequel il égratigne au passage quelques hommes politiques avec des propos bien acérés. Il décortique le phénomène de la mondialisation, des délocalisations d'usines et dénonce le mépris des dirigeants. Il dépeint des situations qui font trop souvent la une des médias et raconte le désespoir, l'humiliation et l'impuissance des laissés pour compte. Tout au long du livre on ressent très fort sa colère et sa profonde empathie pour les victimes de la crise économique et de la casse sociale. Voilà un écrivain qui a choisi, de livre en livre, de parler de l'homme, des démunis, des faibles et qui le fait magnifiquement bien avec beaucoup de justesse et d'humanité. Un livre fort et nécessaire comme tous les romans de cet auteur. Un roman qui fait écho au film "En guerre" sorti cet hiver.
Ce roman est finaliste du prix Landerneau.
Citations
Citations
" La terre vous a toujours nourris, les usines, elles, ne poussent qu'une fois et n'engraissent que ceux qui les possèdent".
L'auteur
L'auteur
Photographe, journaliste, réalisateur, Pascal
Manoukian a couvert un grand nombre de conflits. Ancien directeur de
l’agence Capa, il se consacre aujourd’hui à l’écriture. Il a publié
notamment, aux éditions Don Quichotte, Le Diable au creux de la main (2013), Les Échoués (2015) et Ce que tient ta main droite t’appartient (2017). (Sources : Éditeur)
Ce roman lu en une journée m'a aussi beaucoup touchée. Pascal Manoukian a l'art de mettre en lumière les plus démunis.
RépondreSupprimerMoi aussi je l'ai lu très vite cet été, happée par cette histoire. Il s'attaque toujours à des sujets très forts et fait mouche à chaque fois. Vivement son prochain !!!
SupprimerJe crois n'avoir jamais rien lu de lui, une erreur à réparer. ;)
RépondreSupprimerJe serai surprise que tu ne l'aimes pas... Commence par "les échoués", une découverte des 68...
SupprimerUn livre tristement d'actualité que je note
RépondreSupprimerOui en plein dans l'actualité, un livre important...
SupprimerMerci beaucoup pour votre fidélité Joelle (avec un peu de retard). Le prochain est en écriture. Sans doute pour janvier 2020. Bonne soirée à vous. Pascal
RépondreSupprimerMerci Pascal pour ce passage sur mon blog et merci pour ce roman si fort. Ravie d'apprendre que le suivant est en route, je serai au rdv... Peut-être m'en direz-vous la thématique le 14 à la SGDL comme vous aviez eu la gentillesse de le faire l'année dernière pour le paradoxe... Bonne journée à vous.
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